A l’Elysée, les regards sont braqués sur Marseille. Alors que les élections municipales s’annoncent plus que dangereuse pour la majorité, le Parti socialiste rêve à voix haute de conquérir cette ville, propriété de la droite depuis 1995.
Un test national. C’est presque une tradition française : après une élection présidentielle, les scrutins locaux sont remportés par le camp du perdant. La « vague rose » de 2008 en est une illustration. François Hollande et ses troupes s’attendent donc à des élections municipales à risque en 2014. D’autant qu’un récent sondage Ifop a placé Stéphane Ravier, le candidat du FN, devant le candidat PS (25% contre 21%)., qui sera désigné ce week-end par une primaire.
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Cette montée du FN n’est pas étrangère aux graves problèmes de violence rencontrés à Marseille, qui a connu 15 assassinats depuis le début de l’année. Au cœur de l’été, Jean-Marc Ayrault, entouré d’une flopée de ministres (Valls, Taubira, Touraine, Duflot et Carlotti), s’était d’ailleurs rendu sur place pour annoncer des renforts policiers et de nouveaux moyens pour lutter contre la criminalité. L’opposition avait alors crié à l’opération de communication. Mais si jamais le PS venant à l’emporter, la prise de guerre serait d’importance et pourrait faire oublier d’autres désillusions dans des villes de moindre importance.
Déboulonner Gaudin. A Marseille, il est (presque) aussi connu que le pastis. Alors que Marseille était une terre de gauche depuis la Libération, le président du groupe UMP au Sénat a réussi à faire tomber Robert-Paul Vigouroux en 1995. Depuis, il trône en maître sur la canebière. Alors tous les candidats du PS en ont fait une cible privilégiée. Marie-Arlette Carlotti a ainsi appelé à "la mobilisation" pour la primaire "pour dire non à un système d'un autre temps". "J’ai essayé de voir ce que [Jean-Claude Gaudin] avait fait, je n’ai trouvé que des bribes. Pire, parmi les opérations qu’il s’approprie il en est que j’ai lancées tel Euroméditerranée, qui a été dévié de son véritable intérêt", a aussi lancé Patrick Mennucci, qui s’amuse sur Twitter à tacler le maire de Marseille, qui le lui rend bien. Et les attaques pleuvent même depuis Paris, manuel Valls, ministre de l’Intérieur, accusant l’édile de ne pas assumer ses responsabilités en matière de sécurité. «Les attaques du PS décuplent mon ardeur», a répondu le vieux lion dans un entretien au Figaro.
Une ministre sur le grill. Lors des élections législatives de juin 2012, 25 ministres étaient candidats. Pour 25 victoires. Mais ce qui était un avantage quelques semaines après la victoire de François Hollande pourrait devenir un handicap après plus d’un an d’exercice du pouvoir par les socialistes. Marie-Arlette Carlotti pourrait en être un exemple, elle qui faisait déjà partie de cette liste de gagnants, et qui s’était d’ailleurs fait une notoriété à Marseille en venant à bout de Renaud Muselier (UMP). Mais bien que placé en tête des sondages, la ministre sait qu’elle joue gros. Jean-Claude Gaudin est plus que jamais installé, le Front national surfe sur l’impopularité du gouvernement et les difficultés de l’UMP, et elle devra en plus affronter un candidat écologiste du sérail marseillais, le député européen Karim Zéribi, plébiscité à 91% par les militants écolos. Autant dire que rien n’est joué pour la ministre. Qui a déjà prévenu qu’elle ne démissionnerait pas de son poste en cas de défaite.
L’ombre de Guérini. Il est sur toutes les lèvres des candidats, qui fustigent le clientélisme dont il est, selon eux, le symbole. Nombreux sont ceux qui jugent que Jean-Noël Guérini garde toujours une influence dans le paysage socialiste local, malgré ses multiples démêlés judiciaires. Dans certaines sections socialistes de la ville, on s'inquiète même pour la mobilisation des électeurs dans une fédération placée sous tutelle en mars après avoir été minée par les affaires et les rivalités. La crainte de voir l'ancien président de la fédération des Bouches-du-Rhône, mis en congé du PS, activer ses réseaux reste bien réelle dans l'esprit de candidats qui ont tous politiquement grandi dans son ombre. Marie-Arlette Carlotti et Patrick Mennucci ont même fait un argument de campagne de la rupture avec le système qu'incarne à leurs yeux l'ancien homme fort de la fédération PS, dont ils réclament à l'unisson le retrait de la vie politique