Jean-Luc Mélenchon a-t-il été trop loin dans sa stratégie de radicalisation vis-à-vis du gouvernement ?
A chaque rentrée, il franchit un cap. L’année dernière, c’était les 100 jours de François Hollande qui était dans son viseur. Cette année, il est donc dans une certaine forme de continuité. Sa stratégie, politique et médiatique, consiste à taper chaque fois un peu plus fort sur le gouvernement. Il est dans son rôle.
Ses alliés communistes semblent toutefois penser qu’il a, cette fois, été un peu trop loin…
C’est un peu la chronique d’une dissension annoncée. On sait depuis le début qu’au sein du Front de gauche, le Parti de gauche de Mélenchon n’a pas les mêmes objectifs que le Parti communiste de Pierre Laurent. Et plus on se rapproche des élections municipales, plus les tensions entre les deux alliés vont augmenter. Le PCF veut certes critiquer le gouvernement, mais sans aller jusqu’à la rupture, car les communistes envisagent des candidatures communes avec le PS aux municipales de 2014. Alors que le Parti de gauche n’a, lui, pas de mairie à conserver, donc rien à perdre. Ils peuvent lâcher leurs coups et entrer dans une logique de surenchère.
Le parti communiste et le Parti de gauche peuvent-ils aller jusqu’à la scission ?
Ils n’y ont pas intérêt. Ils vont continuer à se taper dessus encore quelque temps, puis ils recolleront les morceaux après les municipales. En 2014, leur intérêt est plutôt de constituer des listes communes pour les élections européennes, généralement favorables aux oppositions. C’est d’autant plus vrai par les temps qui courent, où la question européenne est l’objet de toutes les critiques. Le rêve de Mélenchon, c’est que sa liste arrive devant celle du PS !
Est-il prisonnier de sa stratégie ou peut-il encore édulcorer son discours ?
Je pense qu’il va se calmer un peu avec les communistes. En revanche, il n’a aucun intérêt à arrêter de taper sur le gouvernement, bien au contraire. Il y aura certainement encore des dérapages, je pense sur le thème du nationalisme de gauche. Sa stratégie fonctionne. Une stratégie également utilisée par… Marine Le Pen : victimisation par rapport aux médias, au grand capital, à l’Europe, aux élites dirigeantes, etc.
A-t-il réussi sa rentrée politique?
Oui, car il a encore réussi à faire parler de lui. Il a le talent pour faire du buzz. Et non, car je pense que son image peut être quelque peu brouillée. Il risque de passer pour celui qui tire dans le dos, sur tout ce qui bouge, y compris au sein de son propre camp où on lui reproche de concentrer davantage ses attaques sur la gauche au pouvoir plutôt que sur la droite. Son omniprésence médiatique et ses coups de gueules commencent aussi à en énerver certains.