Une semaine après une intervention très courte et enregistrée, François Hollande a choisi mercredi une communication radicalement opposée pour revenir sur l’affaire Cahuzac et ses conséquences. Le président de la République s'exprimait en direct, et a répondu à quelques questions de journalistes à l'issue de son allocution. Très ferme et solennel, le chef de l’Etat a développé trois axes de son plan pour moraliser la vie politique.
# Au nom de la transparence renforcée
• Une Haute autorité créée. Il s’agit probablement de l’annonce la plus spectaculaire et la plus redoutée par certains dans la classe politique. "Les règles qui régissent l'établissement, le contrôle et la publication des patrimoines des responsables publics seront entièrement revues", a annoncé François Hollande. "Une Haute autorité sera créée, totalement indépendante. Elle contrôlera les déclarations de patrimoine mais aussi les déclarations d'intérêts des membres du gouvernement, des parlementaires, des responsables des grands exécutifs locaux et des dirigeants des grandes administrations", a-t-il énuméré. Le président est même allé plus loin : "les déclarations de patrimoine viseront aussi les membres des cabinets ministériels où il y a des confusions", a-t il annoncé.
• Un non-cumul avec certaines professions. François Hollande a par ailleurs annoncé que certains parlementaires seraient obligés de mettre entre parenthèses leur profession pendant leur mandat. "Il sera proposé d'étendre l'interdiction du cumul d'un mandat parlementaire avec l'exercice de certaines activités professionnelles pour prévenir tout conflit d'intérêts", a-t-il annoncé, précisant que les professions concernées seront "fixées par la loi". "Si l'on prend un exemple, un médecin peut soigner tout en étant parlementaire. Est ce qu'un médecin peut travailler dans un laboratoire qui aura fixé un certain nombre de règles ? Vous avez la réponse", a-t-il argumenté.
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# De nouvelles armes pour la justice
• Création d’un parquet financier… François Hollande a annoncé sa volonté de "renforcer la lutte contre la grande délinquance économique et financière". Pour cela, "j'ai décidé la création d'un parquet financier, c'est-à-dire d'un procureur spécialisé, avec une compétence nationale, qui pourra agir sur les affaires de corruption et de grandes fraudes fiscales", a déclaré le chef de l'Etat. "Il conduira, coordonnera toutes les enquêtes sur ces graves infractions, ce qui aura le mérite, à la fois, de la concentration des moyens et de l'efficacité des procédures", a ajouté le président de la République.
• …Et d’un office central. François Hollande a également annoncé la création d'un office central de lutte contre la fraude et la corruption. Cet office "regroupera les moyens qui existent déjà au ministère de l'Intérieur, au ministère des Finances de façon à ce qu'il puisse y avoir, là encore, coordination, efficacité, mobilisation. Des outils de procédure exceptionnels comme d'investigation seront confiés à cet office", a-t-il précisé. "Et pour les élus qui auraient à connaître cette condamnation, une inéligibilité temporaire voire définitive pourra être prononcée dès lors que ses motifs auront été identifiés et reconnus par la justice", a-t-il prévenu.
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#La lutte contre les paradis fiscaux
Les banques françaises devront jouer le jeu. Comme son prédécesseur Nicolas Sarkozy, François Hollande s’est montré très ferme à l’encontre des paradis fiscaux, qu’il veut "éradiquer en Europe et dans le monde". D'abord, "les banques françaises devront rendre publique chaque année la liste de toutes leurs filiales partout dans le monde, pays par pays" et "devront indiquer la nature de leurs activités", a-t-il précisé. Selon lui, "il ne sera pas possible pour une banque de dissimuler les transactions effectuées dans un paradis fiscal" car "l'ensemble de ces informations seront publiques et à la disposition de tous". "Je veux que cette obligation soit également appliquée au niveau de l'Union européenne et demain étendue aux grandes entreprises", a poursuivi le président de la République.
Les paradis fiscaux sous surveillance. Par ailleurs, "la France établira chaque année une liste de paradis fiscaux", a-t-il annoncé. Si cette liste existe déjà dans les faits, François Hollande a précisé qu’elle sera désormais dorénavant établie "en fonction non seulement de signatures de conventions avec les pays mais de la réalité, de l'effectivité des informations qui seront données". "Je n'hésiterai pas à considérer comme un paradis fiscal tout pays qui refuserait de coopérer pleinement avec la France", a-t-il menacé.