Dénigrer les autres avant de parler de soi est rarement une stratégie gagnante, jurent les spécialistes en ressources humaines. Mardi soir, l’UMP avait tout de même décidé de tenter le coup. Durant deux heures et demie au studio Gabriel à Paris, le parti présidentiel et une trentaine de ses ténors ont ainsi pilonné le projet du PS pour la présidentielle, qu’ils chiffrent à "255 milliards d'euros" de dépenses en plus sur cinq ans. Nom de code de cette réunion dédiée "au décorticage" du projet "irréaliste" du PS : "Convention riposte".
Mais n’est-ce pas risqué de fustiger un programme avant d’avoir présenté le sien ? "Eh bien non. Dans une démocratie, il est normal de faire une analyse contradictoire", répond d’abord la ministre de l'Apprentissage Nadine Morano, visiblement échauffée par la question. Et puis, "nous parlons de nous, en parlant d’eux", promet la secrétaire d’Etat aux Solidarités Marie-Anne Montchamp, interrogée par Europe1.fr. "Nous défendons avant tout l’action du président de la République", ajoute-t-elle insistant sur la "nécessité de rétablir la vérité (…) de pas laisser les électeurs se faire berner par l’écran de fumée politicien" distillé par la primaire socialiste.
"L’UMP ne fait que son devoir"
A la tribune François Baroin le dit haut et fort sans qu’on lui pose la question : il n’y a pas de problème sur la méthode. "L’UMP ne fait que son devoir : éclairer les Français. L’UMP ne fait que son travail, quarante-huit heures après la désignation du candidat socialiste".
"Et puis, si nous ne tapons pas sur les propositions socialistes, qui le fera ?", raille Benjamin Lancar, président des jeunes Pop’, croisé au détour d'un couloir. Pour lui, il est "plus que nécessaire de lancer la contre-offensive" après la trop longue session de primaire socialiste. Bref, "c’est une technique de combat politique" tout à fait légitime, selon lui.
La méthode n’est pas mauvaise, assure encore Thierry Saussez, spécialiste de la communication et ancien patron du service d'information du gouvernement (SIG). "Du moment où votre projet n’est pas prêt et après une période où les Français ont consommé quasi-quotidiennement de la primaire socialiste de décrypter le message de ses adversaires", commente ce proche de Nicolas Sarkozy, joint par Europe1.fr.
Une convention "nécessaire mais limitée"
"Effectivement, n’être que sur la défensive n’est pas une bonne posture de communication. Mais il s’agit avec cette convention d’une première phase. Le reste viendra après, avec la présentation du programme du parti présidentiel", indique-t-il, précisant que l’UMP ne pouvait faire autrement que de s’inscrire dans l’agenda médiatique monopolisé pendant plusieurs semaines par l’investiture socialiste.
Au final, cette convention de "riposte" est "une démarche nécessaire, convenue et limitée", résume le politologue Séphane Rozès. Elle était "nécessaire pour l’électorat de droite agacé par la primaire citoyenne. C’est ensuite convenu, parce que la démarche n’est pas très originale et puis c’est limité, parce qu’un parti ne peut pas créer de l’adhésion en se définissant par rapport à un adversaire, mais en proposant des solutions", explique-t-il. En somme, la grand-messe de l’UMP avait surtout pour objectif de remobiliser les sympathisants de droite.