En quatre mois de campagne et trois débats télévisés, les candidats à la primaire PS ont pris, petit à petit, leurs distances avec le projet du parti socialiste, adopté pourtant à l’unanimité en mai dernier. Liés par ce programme - à l’exception de Jean-Michel Baylet, le radical de gauche de la primaire - ils ont développé leurs idées "perso". Voici en quoi consistent ces points de "divergences".
HOLLANDE - Dans son programme pour la primaire socialiste, François Hollande avance une idée inédite qui n’est pas dans le programme socialiste : tout employeur qui s’engagerait à garder un senior jusqu'à sa retraite et embaucherait dans le même temps un jeune de moins de 25 ans serait dispensé pendant trois ans de cotisation sociale sur les deux emplois. L’élu de Corrèze table sur 200.000 "contrats de génération" pour un coût total de huit milliards d’euros. Une somme trop élevée, selon ses camardes socialistes.
A la surprise générale, François Hollande, qui avait fait de la lutte contre les déficits l'un de ses chevaux de bataille, a également annoncé, début septembre dans l’Aisne, qu'il recréerait, s’il était élu, en cinq ans, les "60.000 à 70.000" postes supprimés par la droite depuis 2007 dans l'Education nationale. Une disposition absente du projet éducatif du PS qui ne mentionne qu'une refonte "des rythmes scolaires et des programmes et la revalorisation du métier d'enseignants".
Enfin alors que les socialistes ont réclamé à l’unisson la suppression de l’Hadopi, François Hollande ne semble plus avoir les idées claires sur le sujet. Selon la société civile des auteurs-réalisateurs-producteurs (ARP), il se serait même engagé à ne pas supprimer la loi. En attendant, l'article évoquant l'Hadopi a disparu du blog du favori des sondages.
AUBRY - C’est l’ex-première secrétaire du parti socialiste qui est restée la plus proche du programme socialiste. Toutefois avant l’été, lors du festival d’Avignon, Martine Aubry - qui n'a jamais caché son goût pour ce ministère - a annoncé que, si elle était élue présidente, elle accorderait "200 à 252 millions d’euros par an pour la culture". Trois domaines seraient concernés : le patrimoine, l’aide à la création et l’aide au développement artistique. Cela représenterait une auguemtation de 30 à 50% le budget de la Culture en un quinquennat. Une dépense non prévue dans le programme du parti socialiste.
ROYAL - Dans le domaine de la sécurité, l’ex-candidate à la présidentielle de 2007 s’est dite, à plusieurs reprises, particulièrement attachée à des propositions qui ne figurent pas dans le programme du parti socialiste, comme "l’encadrement éducatif militaire des jeunes" délinquants ou encore le principe d’une "sanction" dès le premier acte d’incivilité.
Dans le domaine financier, la présidente de la région Poitou-Charentes souhaiterait également interdire aux banques de spéculer. Comme Arnaud Montebourg, elle propose ainsi "que l'Etat entre au capital des banques qu'il renfloue, comme ça, on aura un ordre économique juste qui sera mis en place", a-t-elle dit, lors d'un déplacement à Vaulx-en-Velin, en banlieue lyonnaise. Enfin, elle propose de signer "un contrat avec la nation", contrat qui prévoit notamment "l’instauration d’un comité de surveillance" des promesses du candidat à la présidentielle, disposition, jusqu'à présente, non-comprise dans l'ADN socialiste.
MONTEBOURG - Le député de Saône-et-Loire a estimé, à plusieurs reprises durant la campagne, que sur certains points comme l'économie, le programme du PS avait "15 ans de retard". "Ma candidature est un ajout, un complément nécessaire. J'ai même envie de dire que le projet socialiste sera condamné à l'impuissance si on ne met pas en oeuvre mon projet de démondialisation", a-t-il ajouté, évoquant une mise sous tutelle des banques et un système de protectionnisme aux frontières.
Pour réduire la dette, il propose également de " tolérer un peu d’inflation, maîtrisée et contenue", ce qui n’est pas à l’ordre du jour du programme socialiste.
VALLS - Autre jeune loup du parti, le député de l'Essonne est celui qui a le plus pris ses distances avec le projet du PS, notamment en affirmant ne pas croire aux "300.000 emplois jeunes" ni à "un retour à la retraite à 60 ans" promis par le texte. Autre prise de distance remarquée : "la TVA sociale". Manuel Valls a suggéré une augmentation d'un point de la TVA à 19,6% et à 5,5%, dont seraient épargnés "les produits de première nécessité". "Cela permettrait d'injecter tout de suite 10 milliards d'euros dans le budget de l'Etat", a-t-il fait valoir lors du deuxième débat.
C’est "une solution de droite", a répliqué Arnaud Montebourg. Une mesure qui affecterait les classes populaires et moyennes, selon Martine Aubry. "Une TVA anti-sociale" qui accentuerait la récession pour Ségolène Royal…