A droite comme à gauche, difficile d’ignorer depuis dimanche soir les 6 millions d’électeurs qui ont choisi le "Front national" au premier tour. Depuis trois jours, le camp UMP multiplie donc les appels du pied. Les socialistes ne sont pas en reste. A chacun sa technique.
# La plus calculatrice
Dimanche soir, sur le plateau de TF1, Jean-François Copé veut montrer que la droite est mieux positionnée que la gauche pour le second tour. "Si on fait le calcul, 42% pour la gauche, 48% pour la droite, prise au sens large. Bien sûr, je sors Bayrou qui est au milieu. Faites le calcul, retirez Bayrou : 42-48". Ni vu ni connu, le patron de l’UMP inclut donc le score du Front national dans le "total droite".
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# La plus diplomate
"Ceux qui s'inquiètent des flux de clandestins ne sont pas des racistes". Dans une interview au Monde jeudi, Ségolène Royal, présidente de la région Poitou-Charentes affirme qu'il ne faut "ni cajoler", "ni dénigrer", ni "insulter" les électeurs du FN, "tout en combattant le poison de ces idées".
# La plus directe
"Le Pen est compatible avec la République". En déplacement à Longjumeau, dans l'Essonne mardi, Nicolas Sarkozy défend le droit de s'adresser aux électeurs du FN. "S'il y a une candidate du Front national, c'est qu'elle avait le droit d'être candidate. Ce vote n'est pas répréhensible. S'il était répréhensible, la République lui aurait interdit de se présenter'", martèle le président-candidat. Des propos qui lui valent de faire la Une de Libération le lendemain.
Regardez le président-candidat à Longjumeau :
# La plus fantaisiste
Dans Mots Croisés lundi soir sur France 2, Arnaud Montebourg jette un froid sur le plateau : "il y a un consensus dans la nation qui s'installe, y compris dans le langage du FN, pour dire que nous avons besoin d'immigration". Présent sur le plateau, l’éditorialiste Olivier Duhamel ne cache pas sa stupéfaction : "je sais que vous avez besoin de ses électeurs pour le second tour, mais vous entendre dire qu'il y a un consensus, les bras m'en tombent". Le député socialiste reste droit dans ses bottes : "je dis que sur la question de l'immigration, du côté de Marine Le Pen, elle a elle-même reconnu qu'on en avait besoin. C'est ça l'élément nouveau".
# La plus empathique
Mardi, dans un chat sur Le Monde.fr, Laurent Wauquiez plaide pour "un devoir de compréhension" pour l'électorat droitier. "Stigmatiser", "ghettoïser", "caricaturer" cet électorat, n’est pas selon le ministre de l’Enseignement supérieur, "la bonne manière de lui répondre. Il y a d'abord un devoir de compréhension".
# La plus maladroite
"C'est un parti qui ne correspond pas à ma conception de la République", commente Claude Guéant sur RTL mardi. Le ministre de l'Intérieur refuse toutefois de répéter que le FN n'est pas un parti républicain, comme il l'avait affirmé en février. Il ajoute : "je vois mal les électeurs du Front national considérer que François Hollande est celui qui va le mieux défendre la sécurité des Français ou va être le meilleur rempart contre l'immigration irrégulière".
# La plus longue
Dans une longue interview publiée mardi dans Libération, François Hollande s’adresse à "l'électorat de Le Pen, dont une part vient de la gauche", et qui selon lui, "devrait se retrouver du côté du progrès, de l'égalité, du changement, de l'effort partagé, de la justice, parce qu'il est contre les privilèges, contre la mondialisation financière, contre une Europe défaillante". "C'est ma responsabilité de m'adresser tout de suite à ces électeurs qui n'adhèrent pas forcément aux idées du FN, l'obsession de l'immigration en particulier, mais qui expriment, avant tout, une colère sociale", souligne le candidat socialiste.
# La plus persuasive
Sur le plateau du Grand Journal de Canal + lundi soir, Nadine Morano s’adresse à son voisin, Louis Aliot, numéro 2 du Front national : "vos électeurs se reconnaissent plus dans les orientations prises par Nicolas Sarkozy que par le programme de François Hollande". Réponse du frontiste : "s’il y a tant de citoyens qui ont voté pour nous, c’est qu’il ne voulait pas voter pour vous". Pas de quoi décourager la ministre de l’Apprentissage : "j’ai toujours respecté les électeurs du Front national", persiste-t-elle.
# La plus versatile
Dimanche soir, sur France 2, Rama Yade analyse les 18% du vote Front national : "Les Français qui votent FN ne sont pas des racistes, ils veulent renverser la table". L’ex secrétaire d’Etat a-t-elle opéré un virage à 180 degrés ? On rembobine. Fin 2010, Rama Yade quitte l’UMP pour rejoindre Jean-Louis Borloo et accuse Jean-François Copé d’engager le parti "sur le terrain" du FN, négligeant "les valeurs de solidarité et d’humanisme". Il y a encore deux mois, Rama Yade déclare : "aujourd'hui, nous avons le sentiment, nous, les républicains, d'avoir le pistolet du FN sur la tempe."