L’INFO. L’image a beaucoup fait parler : Cécile Duflot et Barbara Pompili, deux élues écologistes, en train de dormir profondément, lors du débat sur la loi de transition énergétique; d'une durée de... 19 heures.
Là on sent que la nuit devient vraiment très très très longue. Mais les @ECOLOdep sont toujours là #DirectANpic.twitter.com/dLmfkeNFtF— Denis_Baupin (@Denis_Baupin) 11 Octobre 2014
"Ce ne sont pas des machines qui font de la politique, ce sont des femmes et des hommes, de chair et de sang", a réagi Claude Bartolone. Le résident de l’Assemblée nationale veut en finir avec les cadences infernales qui offrent ce genre d’image préjudiciable à la fonction. Il a donc déposé une proposition de résolution mardi soir.
"Arrêter avec cette idée qu’une loi est bonne lorsqu’elle est votée à 4 heures du matin". Moqué sur le plateau du Petit Journal dont il était l’invité spécial, lundi dernier, Claude Bartolone, a d'abord souri en voyant cette photo qui a embrasé les réseaux sociaux. Avant d'estimer qu’il "faut arrêter avec cette idée qu’une loi est bonne lorsqu’elle est votée à 4 heures du matin. Ce n’est pas normal, donc j’essaye de changer ça."
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Deux jours plus tard, Claude Bartolone a livré le fruit de sa réflexion. Europe1.fr a soumise ses propositions à son prédécesseur au Perchoir, Bernard Accoyer, éminent connaisseur de l’hémicycle, où il est élu depuis plus de 20 ans. Le député UMP de Haute-Savoie rappelle d’entrée que les propositions de réformes de Claude Bartolone "s’inscrivent dans la continuité de la modernisation engagée lors de la précédente mandature. Je suis satisfait de voir que la gauche applique les réformes qu’elle avait promis d’abroger en cas d’arrivée au pouvoir…"
>> Limiter les séances au-delà d'une heure du matin
L’exemple de Cécile Duflot et Barbara Pompili endormies n’est pas un cas isolé. Le travail de nuit est une réalité de l’Assemblée nationale, et nombre de députés s’en plaignent. Claude Bartolone se souvient par exemple avoir, lors du débat houleux sur le mariage homosexuel, "levé deux fois la séance à huit heure du matin…Je sais ce que cela représente comme effort physique ! Ce n’est pas normal et je vais essayer de changer ça".
Sa proposition : afin que l'Assemblée légifère "dans de meilleures conditions", il ne pourrait être dérogé à l'heure limite pour les séances de nuit (1 heure du matin) que pour achever une discussion en cours. Depuis 2012, 126 séances se sont achevées après cet horaire (sur un total de 234 séances de nuit), contre 80 (sur 226) entre 2002 et 2004.
L’avis de Bernard Accoyer : "Il a complètement raison ! Depuis la réforme Seguin (en 1994, ndlr), nous ne devrions plus travailler de nuit. D’abord car cela coute très cher, puisque tous les employés sont payés double. Ensuite, cela désorganise complètement le travail de tout le monde, sans parler de l’horloge biologique. C’est le contraire de ce qu’il faut faire. C’est un non-sens qui entame la fiabilité du travail des parlementaires."
>> Limiter les questions écrites des députés
Le constat est implacable : le nombre de questions écrites a doublé en moins de vingt ans (près 13.377 au cours de la session 1995-1996 contre 26.906 au cours de la session 2013-2014) tandis que le taux de réponse des ministres, dans le même temps, a diminué fortement (68% depuis juin 2012 contre 96% de 1993 à 1997). Claude Bartolone y voit un lien de cause à effet et propose donc qu’elles soient plafonnées à un nombre maximal, fixé à chaque début de session ordinaire par la conférence des présidents de l'Assemblée, qui réunit autour du président de l'Assemblée nationale les chefs de file des groupes politiques.
L’avis de Bernard Accoyer : "Là, c’est bien moins évident… Je suis d’accord pour dire que certains parlementaires multiplient à l’excès les interventions, parfois même préparées par leurs collaborateurs. Mais les questions écrites sont aussi un moyen pour les élus du peuple de contrôler l’action du gouvernement. Donc d’accord pour les restreindre mais il faut être prudent. Et il faut que les groupes politiques soient consultés en amont et qu’ils soient d’accord."
>> Renforcer la transparence des commissions
Le travail des commissions, au nombre de huit (affaires économiques, affaires culturelles et éducation, affaires étrangères, affaires sociales, défense nationale, développement durable, lois et finances) est une étape essentielle du parcours législatif. Ce que le citoyen sait peu. Et la retransmission en direct de leur travail en vidéo ne suffit pas, selon le président de l’Assemblée nationale. Claude Bartolone aimerait donc que chaque commission assure la publicité de ses travaux, ce qui est actuellement facultatif. Avec un bémol, toutefois : "Le bureau de chaque commission pourra néanmoins, mais à titre exceptionnel et sous réserve d'une décision motivée et publique, déroger à l'obligation de publicité".
L’avis de Bernard Accoyer : "Ce n’est que la poursuite de ce que j’ai engagé lors de la précédente mandature. C’est moi qui ai fait installer des caméras pour retransmettre en direct, en interne, tous les travaux. Les publier est une suite logique. Il fallait simplement laisser passer un peu de temps pour que les gens s’habituent. Et je suis également d’accord sur la nécessité de conserver la possibilité de travailler à huis clos".