Un président de droite dans un Sénat de gauche, "techniquement c’est possible. Politiquement, la facture sera très lourde pour Sarkozy", résume le politologue Stéphane Rozès, alors que s’engage, lundi, la lutte pour emporter le "plateau" de la Chambre haute.
Dimanche la gauche a bel et bien remporté une majorité absolue au Sénat, mais Gérard Larcher, le président UMP sortant, a déjà annoncé sa candidature à sa propre succession. Soutenu par les ténors de son parti - Christian Jacob, Alain Marleix, Jean-Pierre Raffarin, Patrick Ollier - il a même promis la victoire à son camp.
Larcher réélu, une équation possible
Ecartant un coup de "bluff" de la part du sénateur, Stéphane Rozès, fondateur de l’agence CAP explique à Europe1.fr que," le mode de fonctionnement du Sénat fait que cette hypothèse est bien possible".
L’élection pour le "plateau", du nom de la vaste estrade du Sénat, est, en effet, rendue incertaine par la courte majorité obtenue par la gauche - 177 voix soit deux de plus que la majorité absolue des 348 sièges. Des outsiders provenant des petits groupes charnières, comme les centristes ou les radicaux, qui pourraient tenter leur chance au premier tour afin de peser pour l'obtention de postes de prestige comme la présidence de commissions, pourraient ainsi fausser la donne.
De plus, "c'est une élection de relations personnelles, où les logiques apparaissent illogiques. Les délégués sénatoriaux ne votent pas que selon leur étiquette politique, leur vote reflète un état d'esprit, une alchimie personnelle", reconnaît, un élu du sérail.
"La petite cuisine" du Sénat
La réélection de Larcher reste donc possible. "Mais ce serait une victoire à la Pyrrhus", analyse Stéphane Rozès, estimant que le coût de ce succès aurait des effets dévastateurs pour Nicolas Sarkozy.
"Il sera très difficile pour l’Elysée d’assumer un tel résultat, au moment où le pays traverse une crise morale et où Nicolas Sarkozy se voit déjà reprocher ses méthodes de gouvernement", poursuit-il avant d’asséner : "le maintien de Gérard Larcher apparaîtrait dans l’opinion comme le résultat de ‘manœuvres peu avouables’, de ‘petits arrangements’, alors que tous les médias ont titré, lundi matin, sur la victoire de la gauche et le basculement du Sénat".
C’est d’ailleurs pour cette raison que la PS a très vite revendiqué "sa victoire", dimanche soir, avant même les résultats de l’Outre-mer. "Les socialistes ont voulu mettre tout le monde devant le fait accompli", décrypte le politologue.
Lundi, les socialistes continuaient leur lobbying mettant en garde l’UMP contre "ses tripatouillages" et ses velléités de "hold-up". "Ce n'est pas dans des manoeuvres de couloirs ou de petits bureaux qu'on arrive à dégager une majorité au Sénat", a martelé Jean-Pierre Bel. Le socialiste sera candidat, tout comme la sénatrice PS, Catherine Tasca, à la présidence du Sénat. Les deux candidats PS se départageront, mardi, lors d'une réunion de groupe.