Serge Dassault garde son immunité parlementaire

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Fabienne Cosnay et Guillaume Biet , modifié à
LA MENACE S’ÉLOIGNE - Le Sénat a une nouvelle fois refusé de lever l'immunité parlementaire de l'industriel.

L'INFO. Serge Dassault, mis en cause dans une enquête sur des achats présumés de votes à Corbeil-Essonnes, ne pourra pas être placé en garde à vue. Six mois après un premier vote négatif, les sénateurs se sont opposés de nouveau, mercredi, à la levée de son immunité parlementaire.

Un refus de justesse. Selon la présidente du groupe Communiste républicain et citoyen (CRC), Eliane Assassi, et le sénateur PS David Assouline, sur les 26 membres du bureau du Sénat, 13 se sont opposés à cette demande qui aurait permis aux magistrats du pôle financier de Paris, Serge Tournaire et Guillaume Daïeff, notamment de placer Serge Dassault en garde à vue, 12 se sont prononcés pour, et un s'est abstenu.

Deux voix manquantes à gauche. Le bureau du Sénat est composé de 26 membres dont le vote est secret : le président du Sénat, Jean-Pierre Bel (PS), les 8 vice-présidents, 3 questeurs et 14 secrétaires. Neuf appartiennent au PS, 3 au groupe communiste républicain et citoyen (CRC), un est écologiste, et un autre RDSE (à majorité PRG).Soit 14 à gauche et 12 à droite. Il a donc manqué deux voix de gauche pour lever l'immunité de Serge Dassault. 

Haro sur les sénateurs PS.  Les réactions à gauche ont été d'autant plus virulentes que les deux voix de gauche qui ont manqué à l'appel resteront anonymes, le vote étant secret. "Refus de la levée de l'immunité de  # Dassaul t: les sénateurs de gauche qui ont manqué à ce vote sont indignes!  # senat # pcf", a twitté Pierre Laurent, sénateur de Paris. "Très surprise", Marie-Noëlle Lienemann (gauche du PS) a constaté "un écart entre ce que les collègues annoncent et ce qu'ils votent". "C'est regrettable. Il a manqué deux voix à gauche et je suis écoeuré de ces défections. Après la réunion, les membres socialistes du bureau étaient tout aussi désolés que moi. Mais il est surprenant que la droite puisse à ce point faire bloc contre la levée de l'immunité", a réagi le sénateur et portze-parole du PS David Assouline. "Deux voix de gauche ont manqué à l'appel, ce qui est consternant", a encore fustigé le chef de file des sénateurs socialistes François Rebsamen.

Et maintenant ? Le riche industriel fait l'objet d'une enquête dans laquelle il est soupçonné d'avoir payé des électeurs pour acheter leurs voix lors des élections municipales de 2008 à Corbeil-Essonnes. Son immunité parlementaire empêche toute mesure coercitive à son encontre. En clair, il ne peut pas être entendu en garde à vue ou être la cible de perquisitions. En revanche, les magistrats ont la possibilité de le convoquer sans garde à vue préalable pour le placer sous le statut de témoin assisté ou aux fins de mise en examen. 

Pourquoi la justice veut l'entendre. "Abus de biens sociaux, corruption, blanchiment et achat de votes" : voilà ce que soupçonne la justice, avec au cœur de ce dossier, les municipales de 2008, remportées par l'industriel, puis invalidées par le Conseil d’État déjà sur la foi de témoignages assurant que des votes avaient été achetés. 

Or, depuis, les éléments troublants se sont accumulés. D'abord le signalement transmis par Tracfin, la cellule anti-blanchiment de Bercy, qui a alerté la justice sur des mouvements de fonds suspects. Mais aussi ces vidéos clandestines, où l'on voit des jeunes de Corbeil-Essonnes demander de l'argent à Serge Dassault. Et enfin la perquisition chez son notaire, qui a permis de découvrir l'ampleur des sommes distribuées par l'industriel, qui se compteraient en millions d'euros. Autant d'éléments sur lesquels les juges d'instruction espéraient interroger le sénateur, dans le cadre du régime de la garde à vue. 

Dassault se tient à la disposition des juges. Les avocats de Serge Dassault ont d'ailleurs affirmé mercredi qu'il se tenait à la disposition des juges d'instruction dans l'enquête. "Serge Dassault a écrit aux juges d'instruction qu'il se tenait à leur disposition et était prêt à se présenter à toute convocation de leur part pour répondre à toutes leurs questions", écrivent dans leur communiqué Mes Pierre Haïk et Jean Veil. Selon eux, "tous les actes d'enquêtes et de poursuite demeurent possibles pour la Justice".

Déjà en juillet. C'est la deuxième fois que le Sénat s'oppose à la levée de l'immunité parlementaire de Serge Dassault. En juillet, des magistrats d'Evry qui enquêtent sur une tentative d'assassinat survenue à Corbeil-Essonnes, s'était déjà heurté au refus des sénateurs.

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