Le calendrier évolue. Nicolas Sarkozy a annoncé, vendredi, à Valenciennes, que les mesures annoncées pour lutter contre le terrorisme seraient "les premières qu'il fera passer si les Français (lui) font confiance" en le réélisant à la présidentielle. Le président-candidat fera d’abord étudier ces réformes au Conseil des ministres. "S'il y a un consensus (...) on verra. Il ne faut pas sur une affaire aussi sérieuse qu'il y ait le moindre soupçon d'arrière-pensées", a estimé le chef de l'Etat, avant d'ajouter : "s'il faut attendre un mois et demi, on attendra un mois et demi". Son Premier ministre affirmait pourtant le contraire quelques heures plus tôt.
Quand Fillon pressait l’opposition
Interrogé sur la façon dont pourraient être appliquées les mesures contre l’apologie du terrorisme, François Fillon avait indiqué sur RTL vendredi matin : "je consulterai les groupes politiques de l'Assemblée et du Sénat pour voir, ce qui devrait être le cas, s'il y a un consensus pour voter ces textes, auquel cas on pourrait les voter avant les élections présidentielles".
Un texte devrait être examiné en Conseil des ministres dans "une dizaine ou une quinzaine de jours", avait-il précisé, avant de mettre la pression sur l’opposition. "S'il n'y a pas de consensus, ce que malheureusement les premières déclarations du Parti socialiste laissent penser, ce texte sera voté dès que le Parlement issu des législatives (de juin, ndlr) sera convoqué".
"On ne peut délibérer ces questions en 10 jours"
Théoriquement, rien n'interdirait de faire examiner le texte au Parlement avant la présidentielle, alors même que le Parlement ne siège plus. L’article 29 de la Constitution prévoit la possibilité de réunir le Parlement en session extraordinaire "à la demande du Premier Ministre ou de la majorité des membres composant l'Assemblée Nationale, sur un ordre du jour déterminé".
Mais François Fillon semblait de toute façon oublier les règles constitutionnelles parlementaires. "La délibération des lois implique du temps, la réunion de commission parlementaires, de magistrats, des études d’impact et l’évaluation des législations existantes", rappelle à Europe1.fr le constitutionnaliste Dominique Rousseau.
Ce dernier souligne aussi que les mesures annoncées par Nicolas Sarkozy "impliquent de trouver un nouvel équilibre entre le principe de sauvegarde de l’ordre public et les libertés publiques". A un mois et demi du premier tour, "on ne peut délibérer ces questions en 10 jours", met en garde Dominique Rousseau, qui rappelle que c’est la révision constitutionnelle de 2008, voulue par Nicolas Sarkozy qui a renforcé les pouvoirs au Parlement.
"Regarder l'efficacité de chaque loi"
Dans l’opposition, l'idée de voter avant l'élection présidentielle les mesures de répression annoncées par Nicolas Sarkozy est rejetée en bloc. "Aucune loi ne peut être votée définitivement et mise en oeuvre avant l'élection présidentielle", a prévenu vendredi Manuel Valls, le directeur de communication du candidat socialiste François Hollande, sur Europe 1.
Le chef de fil des députés socialistes a, quant à lui, appelé à la prudence. "On n'est pas dans la com là, on est dans le sérieux, dans du lourd (…). Il faut "regarder l'efficacité de chaque loi", et "l'efficacité aussi de nos services de Renseignement", a demandé Jean-Marc Ayrault.