Au lendemain de l'électrochoc provoqué par la perte du triple A français, la classe politique s'est réveillée avec la gueule de bois samedi. Et à moins de 100 jours de la présidentielle, les politiques ont trouvé le remède idéal : s'affronter sur le terrain de la responsabilité.
"C'est une politique qui a été dégradée, pas la France"
A gauche, du PS au NPA, plusieurs responsables politiques ont estimé samedi que le gouvernement était responsable de la dégradation de la note française et "n'assumait pas ses échecs". "La France ne peut que constater l'incompétence et l'irresponsabilité de ses dirigeants actuels (...), a jugé le député PS de Saône-et-Loire Arnaud Montebourg. "Les choix actuels du gouvernement de Nicolas Sarkozy et François Fillon ne font que renforcer la crise en faisant toujours plus de cadeaux aux banques", a dénoncé de son côté Philippe Poutou, candidat du NPA à la présidentielle.
Mais c'est le candidat socialiste à la présidentielle François Hollande qui avait ouvert le bal depuis son QG samedi matin. Prenant acte de la gravité de la situation, le député de la Corrèze a voulu faire passer un message : "c'est une politique qui a été dégradée, pas la France". "Nicolas Sarkozy avait fait de la conservation du triple A un objectif de sa politique et même une obligation pour son gouvernement. C'est ainsi qu'avaient été justifiés pas moins de deux plans de rigueur en quatre mois. Cette bataille, et je le regrette, a été perdue", a-t-il déclaré.
"Ceux qui dramatisent doivent réfléchir"
La réplique n'a pas tardé. Deux heures plus tard, François Fillon a pris la parole depuis Matignon, déclarant que le socialiste "avait particulièrement tort" d'affirmer cela. Le Premier ministre a condamné tour à tour le refus du PS de voter la règle d'or budgétaire et son opposition à la réforme des retraites. "Ceux qui dramatisent la situation doivent y réfléchir à deux fois : ce sont en effet les mêmes qui ont refusé de voter les réformes destinées à renforcer notre compétitivité ou à réduire les déficits", a poursuivi François Fillon.
Pour s'assurer de bien faire passer le message, l'UMP a dans le même temps fustigé en choeur le candidat socialiste, l'accusant de se "réjouir" de la dégradation de la note par S&P "pour des raisons électoralistes". Bruno Beschizza, secrétaire national de l'UMP, a dénoncé "l'incurie socialiste sur le sujet de la dette" tandis que Philippe Juvin, député européen, a proposé que le candidat socialiste "soumette son programme" à S&P "pour voir". Benjamin Lancar, président des Jeunes Populaires, a quant à lui souligné que "jamais ni François Hollande ni le parti socialiste ne se sont montrés conscients des enjeux de soutenabilité de la dette publique française".
Un partout balle au centre
François Bayrou, candidat du MoDem à la présidentielle et ancien ministre de l'Education nationale a, quant à lui, une nouvelle fois renvoyé droite et gauche dos à dos. Le centriste a jugé samedi qu'il y avait "une coresponsabilité" de l'UMP et du PS dans la perte par la France de son triple A, qui va "obliger tout le monde à regarder la réalité en face" et à "quitter les chimères". Si le Béarnais "ne met pas tout le monde sur le même plan" et juge que "naturellement, il y a une responsabilité récente des gouvernements de Nicolas Sarkozy", la situation actuelle a, selon lui, "pris naissance au milieu ou à la fin des années 90" et "engage donc la responsabilité des deux forces qu'on présente comme principales, l'UMP et le PS".
Et le centriste de rappeler que "dès 2002", il avait "proposé ce que l'on a depuis appelé la règle d'or".
Un peu sur le même registre, Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à l'Elysée a dénoncé "la capitulation sans conditions" de tous les responsables politiques face aux agences de notation et à la crise.