Depuis le déclenchement des hostilités à l’UMP, le 19 novembre, Patrick Devedjian observe un bien étrange silence. En cherchant bien, celui qui fut pourtant secrétaire général de la formation de droite, en 2007-2008, ne s'est signalé que d'un simple tweet en deux semaines pour donner son avis sur la guerre des chefs.
Ump. Tout le monde conviendra au moins d'une chose c'est que la cocoe et son président sont des nuls.— Patrick Devedjian (@DevedjianP) Novembre 21, 2012
Pas besoin d’aller chercher loin pour comprendre pourquoi ce traditionnel habitué du verbe haut observe un désintérêt ostensible pour les joutes parisiennes. C'est que l’homme est en campagne. Sa victoire à la députation invalidée, il doit repasser devant les électeurs les 9 et 16 décembre prochain. Et si le ministre de la Relance, vu le contexte, prend soin d’éviter sur le terrain la crise à l’UMP, le sujet qui fâche se rappelle inévitablement à lui.
"Ici, copéistes et fillonistes s’entendent bien"
Ainsi dimanche matin sur le marché d’Antony, son fief, dont il a été maire pendant près de 20 ans. "Il ne faut pas baisser les bras. L’UMP va se redresser", lui lance une sympathisante, Patrick Devedjian acquiesce d’un sourire, mais ne s’étend pas sur la question. Un peu plus loin, la même sympathisante est moins enthousiaste. "Ça me désole et ça m’inquiète", nous confie-t-elle au sujet de la crise à l’UMP. "Si ça ne s’était pas passé comme ça, c’était dans la poche pour Patrick Devedjian. Mais là…"
Patrick Devedjian s’attache lui à relativiser la portée du psychodrame sur le terrain. "Moi, je m’efforce de rassembler. Ici, il n’y a d’ailleurs aucun incident, aucune difficulté. Copéistes et fillonistes s’entendent bien", assure-t-il. A ses côtés, Thierry Solère, député de la 9e circonscription des Hauts-de-Seine, mais surtout soutien de Copé quand lui a soutenu Fillon, est venu en voisin pour appuyer ses propos.
"J’ai toujours survécu"
Car malgré cette sérénité affichée par son candidat, l’UMP a tout de même sorti le grand jeu. Au cas où. Outre le tombeur de Claude Guéant, une bonne trentaine de "blousons bleus" sont mobilisés pour distribuer tracts et bonne parole. Tous insistent sur le "parachutage" du candidat socialiste, Julien Landfried, pendant que Patrick Devedjian joue le régional de l’étape et affiche sa confiance. "Dans les Hauts-de-Seine, on est entraînés aux turbulences", rigole-t-il. "On sait les traiter. Et vous remarquerez que j’ai toujours survécu."
Dans le camp d’en face, les militants socialistes, identifiables à leur chasuble rouge, sont à peine moins nombreux devant le marché d’Antony. Signe aussi que Julien Landfried, leur candidat, qui n’avait échoué qu’à 191 voix en juin, y croit dur comme fer. Et il n’est pas seul. Le jeune homme, 34 ans, a déjà reçu les visites d’Harlem Désir et de Vincent Peillon. Dimanche, c’est Manuel Valls qui a fait le déplacement. A son arrivée, le ministre de l’intérieur happe l’attention de tous, militants des deux bords, badauds et journalistes.
"Vague à l’âme"
Loin du tumulte, Patrick Devedjian conserve son air enjoué. Le président des Hauts-de-Seine continue de distribuer les poignées de mains… et les bons mots. "Montebourg, c’est l’InterMittal de la politique", tacle-t-il au sujet du ministre du Redressement productif". "Manuel Valls, la dernière fois qu’il était venu dans la circonscription, c’était pour aller à l’opéra en plein air. Voir sa femme", persifle-t-il au sujet du ministre de l’Intérieur, dont l’épouse est violoniste.
Mais un autre trait d’esprit lâché au détour d’une phrase trahit un certain trouble. En évoquant la vague rose dont aurait profité son adversaire lors du scrutin de juin, Patrick Devedjian glisse un éloquent : "il n’a plus de vague, mais moi j’ai le vague à l’âme."