Valls fait de moins en moins l'unanimité à gauche

Cécile Duflot s'oppose radicalement ux prises de position de son collègue de l'Intérieur Manuel Valls sur l'immigration et la politique pénale, excluant toute remise en cause du regroupement familial des immigrés.
Cécile Duflot s'oppose radicalement ux prises de position de son collègue de l'Intérieur Manuel Valls sur l'immigration et la politique pénale, excluant toute remise en cause du regroupement familial des immigrés. © REUTERS
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ZOOM - Le ministre de l’Intérieur agace de plus en plus ses collègues du gouvernement, notamment les écolos.

Contexte. On ne voit que lui, on n’entend que lui, on ne parle que de lui. Cet été, Manuel Valls est partout. Mardi, il s’est rendu à Marseille pour la huitième fois en un an, la plupart du temps après des faits divers. Mais cette fois, il était accompagné de Jean-Marc Ayrault et de quatre autres ministres. Une façon pour Matignon de rappeler qui est le patron. Et de cornaquer un ministre qui agace de plus en plus au sein du gouvernement.

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"Manuel en a trop fait au service de sa propre popularité". Les chaînes d’informations en continu se sont régalées : Manuel Valls et Christiane Taubira ensemble sur le terrain, sourire aux lèvres. L’opération de communication est bien réglée. "Mais en réalité, c’est la guerre police-justice", lâche un conseiller ministériel à Europe 1. Alors que, en début de journée, seul le ministre de l’Intérieur avait prévu de se rendre à Marseille, le Premier ministre a finalement décidé de reprendre la main, de se déplacer et d’annoncer lui-même le renfort de 24 policiers dans la cité phocéenne. L’hyperactivisme estival de Manuel Valls a agacé à Matignon. "Mais ça, ce n’est pas nouveau", rigole un ministre auprès d’Europe 1. Sauf que le style Valls a aussi irrité le président. "C’est vrai que cet été, Manuel en a trop fait au service de sa propre popularité. Hollande apprécie son travail mais veut qu’il joue plus collectif", glisse un habitué de l’Elysée. Mercredi, après le conseil des ministres, Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement, a d'ailleurs mis les choses au point : "le président de la République a estimé que la politique migratoire et le regroupement familial ne faisaient pas partie des débats de cette rentrée".

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"Ce n’était pas le moment d’agiter le chiffon rouge". Outre les critiques sur la forme, le positionnement politique du ministre de l’Intérieur fait également plus que débat au sein du gouvernement. En affirmant, lors du séminaire de rentrée gouvernemental, que "la question du regroupement familial pourrait être revue", et en abordant la question de la compatibilité de l’islam avec la démocratie, Manuel Valls a mis sur la table deux tabous de la gauche. "Franchement, ce n’était pas le moment d’agiter le chiffon rouge. Ce séminaire était passionnant et on ne retiendra que cela", regrette un ministre dans Le Figaro paru mercredi. "Je ne crois pas que la mise en cause du regroupement familial soit une manière de faire vivre notre cadre républicain", a gentiment taclé Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales, mardi matin.

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"Il ne rend pas service à la gauche". Cécile Duflot a la dent plus dure avec son collègue du gouvernement. Dans Libération, la ministre du Logement, sans toutefois citer nommément Manuel Valls, prend fait et cause pour la garde des Sceaux dans l’affrontement idéologique qui l’oppose au ministre de l’Intérieur sur la politique pénale du gouvernement. "En matière de justice, il n'y a qu'une ligne de gauche. Elle est très bien portée par Christiane Taubira", a-t-elle lancé, estimant encore que "ce n'est pas en bourrant les prisons qu'on améliore la sécurité". Pascal Canfin, le ministre délégué au Développement, estime quant à lui, dans un entretien au JDD.fr, que "Valls déclenche le désordre".

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Razzy Hammadi (photo), membre de l’aile gauche du Parti socialiste, demande, quant à lui, au ministre de l’Intérieur, dans le Figaro, "d’aborder les sujets avec méthode et sérieux (…) et pas seulement en fonction de la traduction qu’ils auront sur la manchette des journaux." Et le député de Seine-Saint-Denis de conclure : "il ne rend pas service à la gauche". Ayrault agacé, Hollande irrité, des ministres énervés, des partenaires fâchés - pour Mélenchon, Valls est "contaminé par le FN" -, le ministre de l’Intérieur est de plus en plus isolé au sein de la majorité.