Valls : l'a priori positif des syndicats

Manuel Valls se veut pragmatique devant les syndicats de police.
Manuel Valls se veut pragmatique devant les syndicats de police. © REUTERS
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Le nouveau locataire de la Place Beauvau est toutefois "très attendu" par les syndicats de police.

Il est partout. Depuis sa nomination Place Beauvau, le nouveau ministre de l'Intérieur multiplie les déplacements et s'efforce d'imposer sa marque dans un ministère attendu au tournant. Manuel Valls a d'ailleurs reçu les syndicats de police vendredi pour une première prise de contact.

Le ministre le sait : le malaise policier est profond. Il n'a donc pas le droit à l'échec. Dès sa prise de fonction, Manuel Valls a voulu envoyer un signal fort. Une fois le premier Conseil des ministres achevé, il s’est rendu, le soir même au commissariat de Noisy-le-Sec, en Seine-Saint-Denis, point de départ du récent malaise dans la police. Un malaise qui s'est exprimé récemment par des manifestations à la suite de la mise en examen d'un gardien de la paix pour homicide volontaire.

Le jour où Manuel Valls a été nommé Place Beauvau, Synergie (2e syndicat d'officiers), évoquait un "contexte très sensible" qui "imposerait de rechercher une politique ambitieuse et innovante". Même constat de Nicolas Comte, secrétaire général d'Unité police SGP-FO : "le ministre prend son poste dans une période critique (…) au moment même où une crise morale sans précédent frappe la maison police". Dans ces circonstances, le volontarisme de Manuel Valls n'est pas pour déplaire aux syndicats de police.

"Il a ce petit côté Sarkozy"

Le directeur de la communication de François Hollande pendant la campagne est une figure atypique à gauche. Lorsqu'il était encore dans l'opposition, il ne s'est jamais gêné pour critiquer l'"antisarkozysme obsessionnel" d'une partie du PS. L’hyper-réactivité du nouveau ministre de l’Intérieur n’est d’ailleurs pas sans rappeler le style d’un ancien locataire de Beauvau : celui de Nicolas Sarkozy justement. "Franchement, il a ce petit côté Sarkozy. Le style nous va bien", sourit un cadre du syndicat de police Alliance police nationale, joint par Europe1.fr. >> "Valls, adepte de la méthode Sarkozy ?" à lire ici.

Pour d'autres, la comparaison n'est pas forcément flatteuse. "La communication, c'est normal, mais il ne faut pas que les caméras continuent. Les policiers ont besoin de travailler dans la sérénité", prévient un cadre d'Unité Police (syndicat majoritaire de la Police Nationale). Ce syndicaliste n'a pas oublié  un "ministre (Nicolas Sarkozy, ndlr) qui a brillé dans les médias et qui pour autant a laissé un bilan catastrophique".  

Un "homme pragmatique et réaliste"

Sur le fond, le parcours du socialiste est salué par tous les syndicats de police. "Au PS, on n'en a pas beaucoup qui peuvent parler sécurité", souligne un responsable syndical contacté par Europe1.fr. Il faut dire que le maire d'Evry, très en pointe sur les questions de sécurité dans son parti, a marqué son indépendance en la matière, en se prononçant par exemple pour une police municipale armée ou pour le recours à la vidéosurveillance. Bon connaisseur des réseaux policiers, il a régulièrement rencontré responsables et syndicalistes. Il est aussi très proche du criminologue Alain Bauer, ancien Grand maître du grand Orient de France, qui a mis ses compétences au service de Nicolas Sarkozy. >> Le "CV" de Manuel Valls, c'est par ici.

La nomination de Manuel Valls à l'Intérieur a d'ailleurs été bien accueillie par les policiers. Peu après l'annonce de la composition du gouvernement, Synergie officiers a salué "son engagement, son refus du fatalisme en matière de sécurité, son discours de fermeté et de responsabilité". De son côté, Alliance police nationale, classé à droite décrit  un "homme pragmatique et réaliste, au regard de ses propres écrits quant aux questions de sécurité". Il faut dire que Manuel Valls est lui-même l'élu d'une ville, Evry, confrontée à des problèmes en matière de sécurité.

"Entre pragmatiques, on devrait pouvoir s'entendre"

Les syndicats de police ont donc beaucoup d'attente. Dans ces conditions, Manuel Valls veut se montrer au rendez-vous. Après avoir fait ces derniers jours "le tour des popotes", comme on dit dans le jargon policier,  le ministre de l'Intérieur s'est réuni autour de la table avec les syndicats de police vendredi pour faire le point. Plusieurs pistes ont d'ores et déjà été mises sur la table. A commencer par la protection juridique des policiers, l'un des problèmes soulevés par la mise en examen du gardien de la paix de Noisy-le-Sec. Le ministre va créer, selon Alliance, une commission composée d'experts, présidée par un conseiller d'Etat. Cette commission aura jusqu'à fin juin pour faire connaître ses orientations en la matière.

Enfin, s'il veut obtenir des résultats, Manuel Valls l'a une nouvelle fois assuré : il veut en découdre avec la culture du chiffre. Selon le responsable du Syndicat national des officiers (Snop), le nouveau ministre "a annoncé qu'il voulait passer à de nouveaux indicateurs qui jouent plus sur le qualitatif que sur le quantitatif, ce qui prouve bien une rupture", s'est-il réjoui. Au total, "nous avons été écoutés", ont souligné les syndicats de police, "et je crois entendus", s'est pour sa part félicité le syndicat Alliance.

Des annonces bien accueillies par la profession, qui face à l'urgence de la situation reste cependant vigilante. Car les syndicats de police se retrouvent sur un point : il "jugeront sur les actes". Un syndicaliste joint par Europe 1.fr se montre plutôt confiant : "entre pragmatiques, on devrait pouvoir s'entendre".