Après avoir tourné autour du pot pendant plusieurs semaines, Dominique de Villepin a mis les pieds dans le plat, vendredi matin, sur BFMTV. "J'ai surtout travaillé avec Jean-François Copé, qui a été mon ministre [au budget, entre juin 2005 et mai 2007, ndlr]. Il a des qualités exceptionnelles", s’est emballé l'ancien Premier ministre.
Pourquoi il soutient Copé. Parce que "c’est un perle rare". Parce qu’il déteste François Fillon depuis presque 20 ans, surtout. Et parce qu'après avoir été relaxé dans l'affaire Clearstream, Dominique de Villepin a apprécié la réaction de son ancien ministre : "La seule chose que je peux vous dire, c'est que ma porte a toujours été grande ouverte pour Dominique de Villepin (...) Elle le sera toujours". L'homme du discours de l'ONU est un homme de lettres, jamais avare d’une bonne formule. "Jean-François Copé est un homme qui sait agir. C'est un chef capable de faire des propositions et de les mener à bien. C'est une vertu tellement rare en politique !" N’en jetez plus…
Pourquoi il déteste Fillon. En 1995, la droite se déchire. Les uns prennent le parti d’Edouard Balladur - c’est le cas de François Fillon, contrairement à son mentor Philippe Seguin -, d’autres parient sur Jacques Chirac, tel Dominique de Villepin. Bien que dans le camp des "perdants", François Fillon intègre le gouvernement d’Alain Juppé. Mais en 2005, quand Dominique de Villepin arrive à Matignon, il écarte le Sarthois sans ménagement, et sans même le prévenir. François Fillon n’a jamais digéré. "Le ralliement est avant tout une question de conviction personnelle, mais il y a aussi une question d’affinité. Que Villepin n’aime pas Fillon a certainement dû peser sur son choix. De l’eau a coulé sous les ponts depuis 95, mais un homme reste un homme…", glisse à Europe1.fr Jean Leonetti, proche de François Fillon, dont il était le ministre des Affaires européennes.
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Un gaulliste pour adoucir une image droitière… Jean-François Copé, distancé dans les sondages, a adopté la même stratégie que Nicolas Sarkozy dans la dernière ligne droite de la présidentielle : à droite toute. Le ralliement de Dominique de Villepin, incarnation du gaullisme social, peut donc tempérer quelque peu, au moins médiatiquement, cette image droitière. "Il représente une sensibilité différente au sein de la droite, c’est une évidence. Cela démontre surtout la capacité de Jean-François Copé a rassemblé l’ensemble de la famille UMP derrière lui, elle qui est si diverse. Cela prouve aussi qu’il saura faire vivre les courants", se félicite Valérie Rosso-Debord, contactée par Europe1.fr. "Villepin est sorti du paysage politique depuis longtemps. Il ne pèse plus rien auprès des militants UMP", tempère Jean Leonetti.
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… mais un gaulliste en guerre avec Sarkozy. Personne n’a oublié l’affaire Clearstream, et cette phrase prononcée par Dominique de Villepin en sortant du tribunal : "Sarkozy avait promis de me pendre à un croc de boucher, je vois que la promesse a été tenue". Depuis, même s’ils disent le contraire, les deux hommes se détestent cordialement. Pour Jean-François Copé, compter parmi ses soutiens le pire ennemi de Nicolas Sarkozy, lui qui joue la carte de la continuité avec le sarkozysme, pourrait donc s’avérer contre-productif. "Je n’ai pas entendu un seul militant se plaindre de l’arrivée de Villepin. La guéguerre avec Nicolas Sarkozy est loin derrière nous…", élude Valérie Rosso-Debord. Christian Jacob, chef de file des députés UMP et bras droit de Jean-François Copé, s’amuse de la question : "C’est simplement le témoignage d’un ancien Premier ministre qui reconnaît le travail remarquable de Jean-François, rien de plus. Vous avez l’esprit tordu !", assure-t-il à Europe1.fr, hilare.
Le mot de la fin. "L’élection ne se fait plus sur des soutiens, nous sommes passés à autre chose, les militants attendent désormais de vrais débats", estime Christian Jacob, alors que Jean-François Copé prie chaque jour un peu plus pour que Brice Hortefeux ne lui déclare se flamme… Ce qui devrait arriver prochainement, selon les informations d’Europe 1. "Cette course aux ralliements est dérisoire, même si j’imagine que Copé est content de récupérer ce qu’il appelle un ‘baron’", tacle Jean Leonetti, content de son bon mot.