"Il nous conduit droit dans le mur". François Sauvadet, vice-président du Nouveau Centre a demandé jeudi la convocation "dès la semaine prochaine" d'un congrès du parti. Objectif : débattre de la candidature de son président, Hervé Morin, à laquelle le ministre de la Fonction publique est opposé depuis le départ. Très bas dans les sondages, l’ancien ministre de la Défense peine en effet à convaincre certains poids lourds du parti de l’opportunité de sa candidature. Y a-t-il péril en la demeure pour Hervé Morin, plus isolé que jamais ?
Une candidature semée d’embûches
Les propos de son collègue François Sauvadet ne sont, en effet, guère rassurants. "On ne peut pas rester comme cela dans une stratégie personnelle qui embarquerait le parti", s’est inquiété jeudi le ministre. Hervé Morin "ne pourra pas rester avec une candidature qui ne rassemble pas d'abord son propre parti", a insisté l'ex-patron des députés Nouveau centre à l'Assemblée, interrogé sur une éventuelle mise en minorité de Hervé Morin sur sa décision.
La candidature d'Hervé Morin, qui oscille entre 0,5% et 1,5% d'intentions de vote peine, il est vrai, à décoller. D’autant que le président du Nouveau Centre ne bénéficie pas du soutien total de sa formation. Maurice Leroy, ministre de la Ville, avait déjà publiquement désapprouvé cette candidature avant même son officialisation. Jean-Christophe Lagarde, numéro 2 du parti a clairement affiché son hostilité et Yves Lachaud, chef de file des députés NC a qualifié la candidature d'Hervé Morin de "démarche personnelle courageuse", mais en rappelant qu'elle se situait "dans le cadre de la majorité présidentielle".
Et l’UMP, brandissant la menace d’un "21 avril à l’envers", a réservé un accueil glacial à cette candidature. Dans "un contexte de crise, il est tout à fait imaginable qu'un certain nombre de Français expriment leur inquiétude en votant pour l'extrême droite. Je souhaite donc que toute notre famille politique soit rassemblée pour éviter à tout prix le risque d'un 21 avril à l'envers", avait lancé en novembre dernier, le secrétaire général de l’UMP Jean-François Copé.
Le camp Morin reste confiant
Mais dans l’entourage du président du Nouveau Centre, on assure rester serein et la nouvelle charge de François Sauvadet n’inquiète pas. Contacté par Europe1.fr, Charles de Courson, fidèle lieutenant d’Hervé Morin tient à faire une mise au point : "quand on est dans un parti, il y a des règles démocratiques. Respectons nos institutions. En février, chacun pourra déposer une motion. C’est le congrès qui se prononcera", déclare l’élu de la Marne.
Car d’après les statuts du Nouveau Centre (article 7), le congrès "se réunit sur convocation du président du Nouveau Centre au moins une fois tous les deux ans, ou à tout moment à la demande du Conseil national exprimée à la majorité des membres qui le composent". Et si Charles de Courson croit savoir que le ministre compte réunir environ 150 responsables locaux du parti, il lui prédit un flop si d'aventure ce dernier mettait son plan à exécution. "On verra ceux qui viendront", glisse-t-il, assurant que dans sa région, "aucun ne fera le déplacement".
De son côté, Philippe Vigier, secrétaire général du parti analyse avec sérénité la démarche du ministre de la Fonction publique. "Il est ministre du gouvernement. C’est plutôt normal qu’il soutienne le président de la République", explique-t-il à Europe1.fr. Pour le député centriste, "ce sont les militants qui décideront" lors du congrès d’investiture du candidat prévue fin février. Malgré cette situation quasi fratricide, opposant le président du parti à son vice-président, Philippe Vigier ne croit pas à une implosion de la formation centriste. "Je n’imagine pas une seule seconde qu’il prenne le risque de faire exploser le Nouveau Centre", assure le député d’Eure-et-Loire.
"Il peut décoller pendant la campagne"
Les soutiens d’Hervé Morin ont quelques raisons de ne pas baisser les bras. "Une campagne électorale peut être un moment où un candidat explose", rappelle ainsi Frédéric Dabi, de l’Ifop. Le politologue souligne aussi que le leader centriste "est quelqu’un de connu dans l’opinion publique", qui se porte relativement bien dans les enquêtes de popularité. Pour Frédéric Dabi, outre le manque de soutien à l’intérieur du parti, c’est principalement "l’espace du centre, espace encombré et préempté par François Bayrou" qui rend les choses compliquées pour Hervé Morin.
C’est peut-être pour cette raison que le président du Nouveau Centre a ouvertement attaqué mercredi son ancien mentor, François Bayrou. "Son consommer français est une escroquerie intellectuelle", a-t-il notamment lancé mercredi, lors de la présentation à la presse de son équipe de campagne.
"Morin est un candidat confettis"
Mais dans le camp Bayrou, on préfère jouer l’amusement. "Il est dans une situation désespérée, même son propre parti ne veut plus de lui", lâche Robert Rochefort, vice-président du MoDem contacté par Europe1.fr. Le député européen n’a pas de mots assez durs pour le président du Nouveau Centre, qui "faute d’être un candidat de proposition, essaie d’être un candidat de nuisance". Et ce proche de Bayrou de qualifier l’ancien ministre de Sarkozy de "candidat confettis" : "c’est comme les feuilles mortes en hiver. Ça s’en va avec le vent".
En attendant le printemps, Hervé Morin va encore accélérer le rythme de sa campagne, annonçant pas moins de 16 déplacements d'ici le 28 janvier.