Deux événements sont passés un petit peu inaperçus cette semaine. Il y a d'abord le spectacle étonnant offert par Emmanuel Macron. Les rumeurs sur la date de sa candidature enflent de jour en jour. Se déclarera-t-il avant le 10 décembre ? Dès la semaine prochaine ? C’est devenu un feuilleton. Dans le même temps, François Hollande a convoqué une soixantaine de députés socialistes pour leur confier sa volonté d'aller au bout, assurant qu’il était seul capable de rassembler la famille. Donc LE sujet à gauche en ce moment se résume en une question : quand est-ce que je me déclare, quel est le meilleur moment pour mettre l’autre en difficulté ?
Une gauche qui se jauge et qui perd le peuple. Et tout ce temps passé à parler de soi, de sa stratégie n'est pas un moment destiné à s’adresser au peuple, pour lui parler des sujets qui l’intéressent vraiment. A ces guéguerres stratégiques, il faut ajouter un éparpillement rarement atteint avec le candidat écologiste Yannick Jadot, Jean-Luc Mélenchon, les communistes qui veulent y aller seuls, les Arnaud Montebourg, Benoît Hamon, Marie-Noëlle Lienemann, Gérard Filoche, etc. Le tableau présenté est bien celui d’une gauche d’appareil qui se jauge, se marque à la culotte sous le regard navré des Français qui, eux, s’inquiètent et aimeraient bien savoir quelle est la vision proposée pour le pays.
L'histoire ne plaide pour la gauche. Quand on regarde dans le rétroviseur, la gauche a de fortes raisons de s'inquiéter. Lors de l'élection présidentielle de 1965, François Mitterrand met Charles De Gaulle en ballotage. Il recueille 31% des voix au premier tour. Mais c'est le maximum que la gauche puisse faire à l'époque puisqu’il est le seul candidat de l’union de la gauche. En 1969, la gauche est disqualifiée et laisse Georges Pompidou et Alain Poher s’affronter au second tour. A l'époque, déjà, il y a cinq candidats de gauche : le communiste Jacques Duclos, le socialiste Gaston Deferre, Michel Rocard, Alain Krivine et Louis Ducatel. Pourtant, le total gauche est à 32%.
Quand la gauche est désunie… Et bien sûr, on ne peut pas oublier 2002. Il y avait carrément huit candidats à gauche. Lionel Jospin est éliminé dès le premier tour alors que si on additionne l'ensemble des voix de gauche, on arrive presque à 43%. Quand la gauche est unie, avec un total gauche faible, elle se qualifie. En revanche, quand elle est désunie, même avec un total gauche très élevé, comme en 2002, elle n'accède pas au second tour. Aujourd’hui, vous avez les deux en même temps ! Un total gauche relativement faible, autour de 35%, et potentiellement une demi-douzaine de candidats. Je vous laisse faire les comptes…