À un mois de la présidentielle, on refait toujours le match de 2017

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Le duel Marine Le Pen face à Emmanuel Macron est le scénario "le plus probable" au second tour, selon les sondages. © Montage Photos AFP
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avec AFP
La répétition du duel de 2017 entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen se profile comme "scénario le plus probable" à un mois du premier tour de la présidentielle, alors que la plupart des Français n'en veulent pas selon les sondages. Un scénario qui pourrait profiter au président sortant.

Les Français, à en croire les sondages, n'en voulaient pas : la répétition du duel de 2017 entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen se profile comme "scénario le plus probable" à un mois du premier tour de la présidentielle. C'est une drôle de campagne : longtemps marquée par un fort désintérêt des Français et par la volatilité de leurs choix, paralysée par la crise sanitaire, elle est désormais bouleversée par l'invasion russe de l'Ukraine, qui "remet en cause les certitudes habituelles des sondeurs et des électeurs", explique à l'AFP Bernard Sananès, président de l'institut Elabe.

L'incertitude des électeurs toujours de rigueur en mars

Dans le calendrier classique d'une présidentielle, le mois de mars est celui où se cristallisent les choix des électeurs, mais cette année l'incertitude est toujours de rigueur : "Un événement majeur qui interviendrait dans les huit derniers jours pourrait avoir un impact sur le vote", prévient Bernard Sananès.

Dans ce contexte particulier, les récents sondages reflètent avant tout l'énorme préoccupation des Français pour la guerre en Ukraine, mais ils donnent tous le même duo gagnant au premier tour : d'une part le sortant Emmanuel Macron, dont l'entrée en lice officielle il y a une semaine a été saluée par un bond dans les intentions de vote qui l'ont propulsé autour de la barre des 30%, voire au-delà; et d'autre part, la candidate du RN Marine Le Pen.

L'irruption de Zemmour et Pécresse peut rabattre les cartes

Le match de 2017, alors remporté haut la main par le chef de l'État, se rejouera-t-il au second tour le 24 avril prochain ? "Pour l'instant, c'est le scénario le plus probable", observe le politologue Pascal Perrineau, non sans prudence. Ce duel, les Français ont répété inlassablement au cours des dernières années dans les sondages qu'ils n'en voulaient plus et les événements qui ont marqué la campagne au cours des derniers mois ont donné l'impression que la lutte pour la seconde place derrière Emmanuel Macron était plus ouverte que jamais.

L'irruption du polémiste d'extrême droite Éric Zemmour dans la campagne à l'automne a paru rebattre les cartes, tout comme la victoire de Valérie Pécresse lors des primaires LR début décembre. Mais, bien que bousculée par les ralliements à Éric Zemmour, comme celui de sa nièce Marion Maréchal dimanche dernier, Mme Le Pen reste deuxième dans les récents sondage, dont celui publié jeudi par Harris Interactive pour Challenge qui la consolide à cette place à 18,5%, loin d'Emmanuel Macron (30,5%).

Marine Le Pen obtient des scores "importants dans les couches populaires"

"Marine Le Pen a retrouvé le rôle d'expression de la France des déclassés, des invisibles", souligne Pascal Perrineau, qui observe dans les sondages des scores "extrêmement importants dans les couches populaires, chez les chômeurs, dans les villages et les villes des périphéries. C'est ce qui fait son retour en grâce". De là à conclure que le match Macron-Le Pen est inévitable, il y a un pas que Bernard Sananès ne veut pas franchir à ce stade, d'autant que Marine Le Pen se trouve "dans la marge d'erreur" avec ses poursuivants dans un sondage publié mercredi par son propre institut. "La deuxième place n'est pas jouée, mais il y a un avantage pour Marine Le Pen", constate-t-il. "L'enjeu va être porté par la dynamique du vote utile".

A gauche, par exemple, l'Insoumis Jean-Luc Mélenchon gagne progressivement du terrain : "C'est une dynamique plus modeste qu'en 2017" lorsqu'il avait obtenu 19,6% des voix, souligne Pascal Perrineau, qui ne cache pas ses doutes sur la capacité d'un candidat "extrême comme lui d'attirer le vote utile à gauche".

Macron bénéficie de "l'effet drapeau"

Quant à Éric Zemmour, dont la campagne stagne depuis quelques semaines, "c'est un homme de médias qui a beaucoup privilégié les coups médiatiques. Il a peut-être un peu négligé la campagne de terrain", souligne le politologue. A droite, Valérie Pécresse "ne parvient pas à enrayer une dynamique négative depuis le meeting d'il y a un mois" au Zénith, explique Bernard Sananès.

Quant à Emmanuel Macron, il bénéficie d'un phénomène appelé le "ralliement autour du drapeau", qui consiste à apporter son soutien au président en exercice en période de crise. "L'entrée en campagne du candidat n'a pas nui au président", commente Bernard Sananès. "Pour l'instant, cet 'en même temps' n'a pas l'air de surprendre les Français", ajoute-t-il.