Pour François Fillon, chaque jour est un calvaire depuis les premières révélations du Canard enchaîné sur Penelope Fillon, soupçonnée d’emplois fictifs, mardi 24 janvier. Depuis, sa campagne s’est considérablement compliquée, à tel point que certains responsables LR l’incitent à renoncer pour conserver les chances de la droite à l’élection présidentielle.
Mercredi 25 janvier : cataclysme à droite
Dur réveil pour l’équipe du candidat de la primaire de la droite : la veille, mardi 24 janvier, le Canard enchaîné a révélé que Penelope Fillon a été employée comme assistante parlementaire de son mari ou de son suppléant pendant huit ans, pour un salaire total de 500.000 euros. Dans l’après-midi, le parquet national financier ouvre une enquête préliminaire pour "détournement de fonds publics, abus de biens sociaux et recel de ces délits".
L’hebdomadaire satirique affirme également qu’elle a été salariée, entre mai 2012 et décembre 2013, de "La Revue des Deux Mondes", propriétée de Marc Ladreit de Lacharrière, un ami de François Fillon. Selon un ancien directeur de la revue, elle n’aurait signé que "deux ou trois notes de lecture", pour un salaire présumé de 100.000 euros.
Jeudi 26 janvier : la cacophonie avant la riposte au 20 Heures
Chez Les Républicains, la cacophonie domine dans un premier temps : certains députés déclarent ne pas avoir connaissance du travail de l’épouse de François Fillon, d’autres affirment qu’ils l’ont croisée à de nombreuses reprises dans les couloirs de l’Assemblée. Au 20 Heures de TF1, le candidat riposte en certifiant que le travail de Penelope Fillon était "réel", "légal" et effectué surtout en circonscription.
Victime de "calomnies" et de "boules puantes", le candidat LR est formel : "Il n'y a qu'une seule chose qui m'empêcherait d'être candidat, c'est si c'est mon honneur était atteint, si j'étais mis en examen." Pour contrer d’éventuelles révélations sur sa famille, il précise qu'il a rémunéré "deux de (ses) enfants qui étaient avocats" pour des missions qu'il leur avait confiées quand il était sénateur, de 2005 à 2007.
Vendredi 27 janvier : mise en cause des deux enfants aînés du couple
La réponse de François Fillon ne convainc pas : à l’époque où il était sénateur, les aînés de François Fillon n’était pas encore avocats, sa fille Marie ayant prêté serment fin 2007, son fils Charles seulement en 2011 en France. Un couac dans une communication bancale : son équipe parle d’une "imprécision de langage", elle qui n’avait visiblement pas distribué d’éléments de langage à la parution du Canard enchaîné.
Alain Juppé peut-il alors être un recours à droite ? Second de la primaire, pressé de questions, le maire de Bordeaux exclut "clairement et définitivement" de remplacer François Fillon. L’hypothèse d’un renoncement émerge petit à petit à droite, malgré la détermination affichée du principal mis en cause.
Samedi 28 janvier : une nouvelle affaire éclate
Hormis la nouvelle d’une perquisition à la revue des Deux Mondes, jeudi 26 janvier, où Penelope Fillon aurait travaillé entre mai 2012 et décembre 2013, pour 100.000 euros brut, rien ou presque ne vient troubler cette journée. Le camp filloniste prépare le grand meeting de la Villette, le lendemain, pour relancer une campagne qui s’enlise.
Dans la soirée, nouveau rebondissement : Mediapart révèle d’abord que François Fillon a profité de crédits initialement destinés à rémunérer des assistants parlementaires, quand il était au Sénat. Le Journal du Dimanche mentionne ensuite qu’il a reçu "sept chèques à son nom", pour un total de "21.000 euros". L’affaire concerne de nombreux sénateurs UMP de l’époque.
Dimanche 29 janvier : contre-attaque du camp Fillon à La Villette
Alors que ce dimanche devait consacrer l’unité du parti à trois mois de l’élection présidentielle, le grand meeting de La Villette, avec plus de 10.000 personnes présentes, se transforme en réponse XXL de François Fillon pour "faire bloc" face à une tempête qui sévit depuis maintenant quatre jours.
Au premier rang, Penelope Fillon retient difficilement ses larmes quand la salle l’ovationne. Le candidat LR défend son épouse, dit avoir "le cuir solide", jure qu’on "ne l’intimidera pas". Les soutiens du Sarthois distillent en parallèle l’idée d’une chasse à l’homme ourdie par la gauche "à trois mois de l’élection présidentielle", nouvel angle de contre-attaque pour le sauver.
Lundi 30 janvier : le couple entendu par les enquêteurs
Des drapeaux tricolores de La Villette aux bureaux de Versailles. Ce lundi 30 janvier, François Fillon et son épouse sont entendus par les enquêteurs. "Comme il l'avait souhaité dès l'ouverture de l'enquête", précise l’équipe du candidat. Lors de ces auditions, le couple Fillon "a apporté des éléments (...) afin d’établir le travail réalisé par Mme Fillon", précise-t-on encore, manière de contrecarrer les nombreux témoignages doutant des tâches véritablement accomplies par Penelope Fillon.
Mardi 31 janvier : deuxième salve de révélations du Canard enchaîné
À l’Assemblée nationale, les députés LR soutiennent "unanimement" leur candidat. Mais en coulisses, la partie se complique pour François Fillon. Après la perquisition des enquêteurs à son bureau, le matin, l’ancien Premier ministre est de nouveau le sujet de nouvelles révélations du Canard enchaîné en milieu d’après-midi : entre son emploi d’assistante parlementaire et de collaboratrice de la revue des Deux Mondes, Penelope Fillon n’aurait pas touché 600.000 euros mais plus de 900.000 euros. Le Parisien révèle également qu’elle n’avait ni badge d’accès ni messagerie électronique lors de sa supposée présence à l’Assemblée, de 1998 à 2007 et en 2012.
Le Canard enchaîné apporte également des précisions sur les rémunérations de Marie et Charles Fillon, les deux premiers enfants du couple : ils auraient perçu 84.000 euros brut en tant qu’assistants parlementaires, de 2005 à 2007. Cinq jours plus tôt, leur père n’évoquait cependant que des "missions". Selon lui, ces révélations ne seraient qu’une "opération de calomnie très professionnelle", "montée pour tentée d'éliminer un candidat autrement que par la voie démocratique".
Mercredi 1er février : l’unité se fissure à droite
Les députés LR se réveillent groggy des révélations du Canard enchaîné. À son QG, François Fillon les enjoint à "tenir quinze jours", alors que "[sa] candidature est remise en cause". Mais la famille politique a beau dénoncer le lynchage médiatique et le "coup d’État institutionnel" venu de la gauche, certains n’hésitent plus à évoquer un renoncement.
Dès la fin de la réunion, Georges Fenech annonce que "le résultat de la primaire est désormais caduc". Anne Levade, qui préside la Haute autorité de la primaire, lui répond que ce n’est pas le cas, prenant soin d’ajouter : "Si le candidat choisit de se désister, c’est autre chose." Un peu plus tôt, le député Philippe Gosselin avait appelé Alain Juppé à "réfléchir" à la possibilité d’être un recours. "Quoi qu’il arrive, je ne serai jamais un plan B", répond le finaliste de la primaire dans la soirée.
Jeudi 2 février : une vieille interview de Penelope Fillon refait surface
La musique du renoncement s’installe. Sur le terrain, dans les Ardennes, François Fillon est chahuté par des individus l’appelant au renoncement, comme le souhaitent sept Français sur dix selon un sondage. En plus de gérer ce déplacement compliqué, l’équipe Fillon doit faire face à l’enquête du Parquet national financier, qui s’étend aux deux enfants aînés du couple.
Sa garde rapprochée doit surtout déminer les révélations d’Envoyé Spécial, qui diffuse le soir une interview de Penelope Fillon datant de 2007, quand son mari accède à Matignon. Elle y révèle qu’elle n’a "jamais été son assistante, ou quoi que ce soit de ce genre". "Des phrases sorties de leur contexte", rétorque son avocat. L’épouse de François Fillon indique pourtant qu’elle allait "dans les associations de personnes âgées, des choses comme ça, mais rien de plus".
Vendredi 3 février : accalmie ou derniers jours en tant que candidat ?
Le renoncement paraît plus proche que jamais. À en croire L’Obs, Gérard Larcher, un de ses proches, le lâcherait dans la journée, information aussitôt démentie par le président du Sénat. Le Monde ou Marianne indiquent que les juppéistes s’activeraient en coulisses pour faire revenir leur champion, qui attendrait l’adoubement de François Fillon.
Reste que l’équipe du candidat LR veut "tenir bon" face à la bourrasque. Le début de semaine s’annonce crucial : les députés vont passer le week-end en circonscription, interpellés par leurs administrés sur ces affaires Fillon. Couplée à des sondages en berne pour l’ancien favori de l’élection présidentielle, cette situation pourrait devenir critique.