Après les législatives, le FN se lance dans la (difficile) quête d'un groupe

Marine Le Pen et sept autres élus FN ou apparentés font leur entrée à l'Assemblée. Insuffisant pour former un groupe parlementaire. © AFP
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Avec huit élus, le parti frontiste n'a pas de quoi constituer un groupe parlementaire à l'Assemblée. Il va donc lui falloir nouer des alliances. Et ce ne sera pas facile.

Jamais, avec un scrutin majoritaire, le Front national n'avait réussi à faire élire autant de députés. Après les législatives de dimanche, ils sont huit (dont deux apparentés) à faire leur (r)entrée à l'Assemblée nationale, contre seulement deux (dont un apparenté) sous la précédente législature. Un chiffre néanmoins bien loin des ambitions du parti frontiste, qui espérait plusieurs dizaines de députés après le premier tour de la présidentielle. Et n'a pas atteint le seuil fatidique des 15 élus nécessaires pour former un groupe parlementaire.

 

"Il suffit de s'entendre". Pourtant, le Front national ne désespère pas d'y parvenir. Interrogé sur le sujet au micro de RTL lundi, Louis Aliot, fraîchement élu dans les Pyrénées-Orientales, a répondu que "bien sûr", sa famille politique comptait obtenir un groupe. Logique, quand avoir un groupe permet d'acquérir plus de poids politique et médiatique. "Il suffit de s'entendre sur un projet d'opposition, et il n'y a aucune raison à ce que nous ne nous associons pas avec d'autres personnalités pour [le faire]", a déclaré le vice-président du FN. Avant de préciser que son parti était prêt à discuter avec "tous ceux qui le désireront".

Bompard et Dupont-Aignan dans le viseur. Le Front national a quelques noms en tête. Comme celui de Jacques Bompard, député Ligue du Sud du Vaucluse, réélu de justesse dimanche soir. Cet ancien du Front national, qui a claqué la porte en 1972, est en désaccord avec le projet de Marine Le Pen sur plusieurs points, notamment sociétaux. Lui est partisan d'une ligne très conservatrice –il est en première ligne sur tous les textes portant sur l'avortement par exemple. Mais ces vieilles querelles pourraient bien être oubliées pour fortifier la droite de la droite.

Quoi qu'il en soit, cela ne suffira pas. Le FN s'attache donc à débaucher d'autres "patriotes". Les regards se tournent (forcément) vers Nicolas Dupont-Aignan, réélu dans l'Essonne, et que Marine Le Pen a tenu à féliciter lundi matin. "Il s'en est brillamment sorti !", a-t-elle complimenté. Le leader de Debout la France, qui avait rallié la présidente frontiste entre les deux tours de la présidentielle avant d'échouer à conclure un accord pour les législatives, avait promis début juin qu'il ne siégerait jamais avec le FN. Dimanche, il semblait déjà nettement moins fermé à l'idée sur Twitter. "L'enjeu maintenant est d'agir vite pour unir les forces de résistance", a-t-il écrit.

Aller piocher chez LR. Pour trouver encore cinq noms supplémentaires, le Front national n'a d'autre choix que de se tourner vers la droite républicaine. En avril dernier, Le Figaro révélait que le parti de Marine Le Pen avait même établi une liste d'une vingtaine de noms d'élus LR susceptibles d'être approchés pour soutenir Marine Le Pen au second tour de la présidentielle. Les mêmes pourraient, en toute logique, permettre d'unir la droite de la droite. Problème : la plupart de ceux qui y figuraient, comme Henri Guaino, Jean-Frédéric Poisson ou Jacques Myard, ne font plus partie de la nouvelle législature.

Il faudra donc que Marine Le Pen et ses députés trouvent d'autres élus de droite FN-compatible. Reste à savoir si la recomposition qui guette LR, entre élus désireux de se montrer "constructifs" avec la ligne gouvernementale et opposants farouches, va faciliter ou non la tâche de l'extrême droite. Dans une interview accordée à Valeurs Actuelles avant de se retirer de la vie politique, Marion Maréchal-Le Pen, ex-députée, avait résumé les ambitions de son parti : construire un nouveau clivage entre "mondialistes" et "patriotes" et travailler avec une partie de la droite. "Un profil comme Laurent Wauquiez […] fait partie de ceux dont les déclarations laissent penser qu'on aurait des choses à se dire et à faire ensemble." L'appel du pied est toujours valable.

Prendre son temps. Marine Le Pen s'est, elle, montrée plutôt prudente lundi, lors d'une conférence de presse. "Nous n'avons pas de groupe aujourd'hui. Rien ne dit que nous n'en aurons pas demain. Mais je sais que ces choses-là ne se feront pas immédiatement", a-t-elle souligné. "Il sera nécessaire de prendre nos marques et de voir également comment les débats évoluent au sein de l'Assemblée." Pour, peut-être, récupérer les élus de la droite dure les plus mécontents du quinquennat Macron.