C'est un livre pensé comme le bilan, plusieurs années après, d'un exercice décevant du pouvoir socialiste : dans L'Engagement, Arnaud Montebourg revient sur les années pendant lesquelles il fut membre du gouvernement, pendant le mandat de François Hollande, de 2012 à 2014. L'ancien ministre du Redressement productif et de l'Économie dresse aujourd'hui un constat amer et féroce de la politique industrielle française, qui représente pour lui une "humiliation nationale", comme il l'explique vendredi au micro Europe 1 de Patrick Cohen.
L'"attaque" d'Obama sur Alstom
Dénonçant "la technostructure" dans son ensemble et son emprise sur les choix politiques stratégiques du pays, Arnaud Montebourg livre un réquisitoire général sur les élites du pays. "L'essentiel des grands dirigeants et des ministres, comme le président, sont des technocrates", analyse-t-il. "Finalement, il y a une espèce de solidarité de corps qui fonctionne sur une même culture politique où on n'affronte pas la puissance."
"Je l'ai vécu comme une succession d'humiliations", confie l'ancien ministre, officiellement en retrait de la vie politique, au sujet de son passage à Bercy. Il revient notamment sur le rachat de la branche énergie d'Alstom par l'Américain General Electric en 2014. Selon lui, les choix faits à l'époque relèvent d'une humiliation nationale avec "la faiblesse de la nation face à une attaque extérieure venue d'un allié. À l'époque, ce n'était pas Donald Trump, c'était Barack Obama. Obama était de gauche et la France était de gauche, mais on n'a pas été capable de se défendre."
Un "système" d'"abandon du pays"
Arnaud Montebourg pointe, pour le feuilleton Alstom comme pour celui, plus récent, de Suez-Veolia, la responsabilité de la haute administration en poste au ministère de l'Économie. "J'ai mis du temps à prendre le commandement effectif (du pouvoir) : les décisions se prennent ailleurs, parce que un ministre qui est, dans la Constitution, le chef de son administration, n'a pas les clés pour prendre le commandement de cette administration dans le système actuel. En fait, ce sont les grands corps qui pilotent tout ça."
" Les alternances se succèdent, mais les décisions sont les mêmes "
"On ne peut pas aujourd'hui continuer avec ce système tel qu'il est", affirme donc Arnaud Montebourg. "On pense qu'en changeant les hommes, ça suffit. Mais en fait, ce sont les mêmes qui dirigent la France depuis 30 ans. Les alternances se succèdent, mais les décisions sont les mêmes", critique-t-il à propos de "ce système qui a une culture politique et économique de l'abandon du pays".