Viendra, viendra pas ? Le psychodrame a duré une bonne partie de la journée de mardi autour d'Alexandre Benalla. L'ancien chargé de mission d'Emmanuel Macron a d'abord refusé de venir s'expliquer devant la commission d'enquête sénatoriale qui, depuis l'affaire de la vidéo du 1er-Mai, tente de déterminer quel était exactement son rôle et ses fonctions à l'Elysée. Tard dans la soirée, l’ancien garde du corps a finalement accepté de se rendre devant la Commission, mais en expliquant qu'il était "contraint". "C'est beaucoup de bruit pour rien, on savait qu'il allait s'écraser", balaye un membre de la commission auprès d'Europe 1. Alexandre Benalla ira donc devant les élus du Palais du Luxembourg, mais à reculons. "Je déplore qu'on m'impose de comparaître devant une commission qui n'a aucune légitimité", a-t-il fait savoir par voie de communiqué.
Audition d'Alexandre Benalla : quels sont les points qui restent à éclaircir ?
L'obligation de comparaître. Il faut dire que les sénateurs ont sur mettre la pression sur cet ancien collaborateur du chef de l'Etat, rappelant qu'il risquait jusqu'à deux ans de prison et 7.500 euros d'amende s'il refusait d’obtempérer. "Peut-être a-t-il entendu qu'il se mettrait dans un extrêmement mauvais cas s'il persistait dans cette attitude", note Jean-Pierre Sueur, le co-rapporteur de la commission. "Tout citoyen se doit de répondre à la convocation d'une commission d'enquête parlementaire. Tout le monde est logé à la même enseigne. Ne considérons pas que c'est un martyr, c'est quelqu'un dont le comportement est parfaitement répréhensible, qui n'a pas de leçon à donner aux parlementaires", ajoute-il, non sans agacement. Le Sénat remporte donc cette première manche par communiqués interposés.
>> De 7h à 9h, c’est deux heures d’info avec Nikos Aliagas sur Europe 1. Retrouvez le replay ici
Quand le législatif s’immisce dans le judiciaire. Reste maintenant l'autre match, en face-à-face. Que dira Alexandre Benalla aux sénateurs ? "Je ne répondrai à aucune question portant sur des faits couverts par le secret professionnel, ni sur les faits qui font l'objet d'une enquête", a-t-il déjà prévenu. Les sénateurs n'ont en effet pas le droit de le questionner sur les incidents qui ont émaillé le 1er mai à Paris. "Le principe qui est en jeu est celui de la séparation des pouvoir. Les commissions d'enquête parlementaire ne peuvent interférer avec l'enquête judiciaire", résume Pascal Gastineau, le président de l'Association française des magistrats instructeurs.
"On fera notre boulot". "En pratique, cela veut dire que les questions des sénateurs à une personne mise en examen dans le cadre d'une enquête judiciaire ne peuvent porter sur les faits qui lui sont reprochés", poursuit-il. C'est-à-dire qu'Alexandre Benalla ne pourra être interrogé "que sur le fonctionnement ou le dysfonctionnement des institutions, de l'exécutif et ce qui est apparu [en marge de cette affaire, ndlr]". "C'est un exercice de dentellière que de pouvoir faire le tri entre les informations qui relèvent de la compétence d'une commission d'enquête parlementaire et celles qui relèvent d'une information judiciaire", reconnaît encore ce juge d'instruction. La commission d'enquête va donc devoir emprunter une ligne de crête."On fera notre boulot", assure de son côté une sénatrice. "On a encore beaucoup de points à éclaircir, sur son port d'arme, sur son rôle auprès d'Emmanuel Macron... et on ne compte pas le lâcher", promet-elle.