Code du Travail : trois réformes à haut risque sur la table

L'avant-projet évoque notamment comme "prioritaire" la fusion des différentes instances représentatives du personnel. © FRED TANNEAU / AFP
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Un document de travail publié par Le Parisien, mais dont le ministère du Travail dément la paternité, dévoile les principales pistes suivies pour la réforme annoncée cet été.

C'est un dossier brûlant. La révision du code du Travail doit être la première grande réforme de l'ère Macron. Et le sujet est d'autant plus épineux que le président a fait savoir son attention de poursuivre dans la voie ouverte par la loi El Khomri, cible d'une importante mobilisation sociale en 2016, mais aussi de légiférer par ordonnances pour pouvoir agir vite et passer outre d'éventuels blocages parlementaires.

Dans son édition du 5 juin, Le Parisien publie un "avant-projet" daté du 12 mai, détaillant huit points de réforme, certain qualifiés de "prioritaires", d'autres de "moins prioritaires", voire de "pas prioritaires". L'un des objectifs affichés de ce document, dont le ministère du Travail a démenti la paternité : "attribuer une place centrale à la négociation collective, en particulier la négociation collective d'entreprise". Si ce brouillon indique que "tous les thèmes énumérés […] ne doivent pas forcément donner lieu à des ordonnances", certaines mesures seraient toutefois susceptibles de mettre le feu aux poudres avec des syndicats sur le qui-vive. Trois d'entre-elle plus particulièrement.

Un contrat de travail ajustable

Etiquetée prioritaire, cette mesure prévoit de laisser aux accords d'entreprise la mise en place du cadre légal régissant CDI et CDD.  Ainsi, concernant par exemple les causes de licenciement, soumises jusqu'à présent à une procédure stricte, celles-ci pourraient être directement prédéfinies dans le contrat, sur la base d'un accord d'entreprise. De la même manière, la réglementation du recours au CDD, dont la durée et le nombre de renouvellement est actuellement limité, pourrait être fixée par accord.

Le brouillon envisage également de laisser aux accords collectifs d'entreprise la définition du temps de travail, "notamment en matière de travail de nuit et de télétravail". Une disposition considérée comme "moins prioritaire", mais particulièrement sensible néanmoins. La version finale de la loi El Khomri avait en effet renoncé à revoir le créneau horaire du travail de nuit – 21 heures à 6 heures –  de même que la réglementation des temps de repos et de récupération, rappelle Le Parisien.

Plafonner les indemnités prud'homales

Une disposition soutenue par le patronat, déjà évoquée puis abandonnée dans la loi El Khomri, et jugée "prioritaire" dans le brouillon publié lundi par Le Parisien. "Instaurer un référentiel pour le montant de l'indemnité octroyée par le conseil des prud'hommes en cas de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse" favoriserait les embauches en CDI, selon le Medef, car cela mettrait fin à l'angoisse des chefs d'entreprises face au montant d'une éventuelle condamnation. À noter qu'en 2015 une mesure équivalente figurait aussi dans la loi Macron, qui définissait un plafond en fonction de la taille de l'entreprise. Le Conseil constitutionnel l'avait finalement retoquée, estimant que le préjudice subi par un salarié n'avait pas de lien avec la taille de l'entreprise.

Mettre en place une instance unique de représentation du personnel

L'avant-projet évoque comme "prioritaire" la fusion des différentes instances représentatives du personnel : comités d'entreprise, délégués du personnel et comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, "sauf accord d'entreprise visant à maintenir les instances existantes ou à en créer de nouvelles". Cette mesure, comme le souligne Le Parisien, pourrait remettre en cause le rôle juridique du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), mais aussi induire une baisse du nombre d'élus. Surtout, si cette instance a vocation à discuter les accords d'entreprise, cela mettrait fin aux monopoles des syndicats en terme de négociation. De quoi provoquer une levée de boucliers.

Les syndicats avaient été reçus par Emmanuel Macron, le 23 mai. Un rendez-vous essentiellement consacré au calendrier de la réforme et à la méthode des ordonnances. De son côté, le ministère du Travail précise lundi qu'un "programme de travail" doit leur être communiqué en vue d'une prochaine concertation.