"Je n'ai pas de respect pour François Hollande". Voilà ce qu'a affirmé, très tranquillement, comme si c'était normal, Bruno Le Maire sur Europe 1 lundi. Le candidat à la primaire de la droite n'est pas le seul à faire des remarques d'une telle brutalité. Vendredi, Laurent Wauquiez, président par intérim des Républicains, s'est tourné vers Gérard Larcher, président du Sénat, pour lui dire en public : "s'il arrive quelque chose à François Hollande, vous seriez le nouveau président de la République, ce qui ne serait pas forcément une mauvaise affaire." Il souhaite donc à François Hollande, lui aussi très tranquillement et comme si c'était normal, de se retrouver en situation d'incapacité, voire pire.
Dédain et mépris inédits. La violence en politique n'est certes pas un fait nouveau. Mais ce dédain, cette façon d'afficher son mépris envers la figure du président, sont inédits. Lorsqu'en 2002, Lionel Jospin disait de Jacques Chirac qu'il était "vieilli, usé, fatigué", c'était irrespectueux et avait été lourdement sanctionné dans l'opinion. En outre, il s'agissait d'une confrontation au plus haut niveau de l'État, entre le locataire de Matignon et celui de l'Élysée, tous deux adversaires dans la course à la présidentielle. Aujourd'hui, ce sont des responsables politiques d'envergure moindre, comme Bruno Le Maire, Laurent Wauquiez ou d'autres, qui se livrent à ce qui relève de l'outrance verbale. Et ce, en toute impunité ou, du moins, dans une indifférence générale.
Désastreuses confidences. Si le climat de tension extrême créé par la primaire peut expliquer cette libération de la parole envers le chef de l'État, ce n'est pas le seul facteur à prendre en compte. François Hollande lui-même porte une part de responsabilité. Comment exiger que l'on respecte l'institution présidentielle quand le président lui-même ne respecte pas, par exemple, l'institution judiciaire, qualifiée d'institution de "lâcheté" dans Un président ne devrait pas dire ça ? Quelque chose s'est brisé avec la sortie du livre des journalistes du Monde, Gérard Davet et Fabrice Lhomme.
Perte d'aura. Malgré toutes les péripéties de ce quinquennat, François Hollande avait toujours un reste d’aura, lié à son statut. En se confiant ainsi sans prudence, parfois dans des situations très anormales comme lors de dîners ou de cocktails chez les journalistes, il a lui-même renoncé à la protection que devrait lui conférer sa fonction. Ce qui ne justifie pas les violences verbales excessives, mais peut les expliquer.