Ségolène Royal a semé le trouble mardi, en laissant croire à une fermeture de la centrale nucléaire pour 2018.
La rentrée de l'exécutif commence bien. Un peu plus d'une semaine après le "couac" d'Emmanuel Macron sur les 35 heures, c'est au tour de Ségolène Royal de semer le trouble au sommet de l'Etat. La ministre de l'Ecologie et de l'Energie a laissé entendre mardi, à la mi-journée, que la doyenne des centrales nucléaires françaises, Fessenheim, fermera en 2018.
En mars, le président de la République avait pourtant renouvelé sa promesse d'engager la fermeture de la centrale du Haut-Rhin, "à l'horizon de la fin du quinquennat", c'est-à-dire en 2017. Promesse répétée par une "source gouvernementale" mardi soir, peu après une tentative d'explication de la ministre dans un tweet assurant : "la fermeture n'est pas reportée".
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Qu'a dit Ségolène Royal, exactement ? "Quand Flamanville ouvrira, Fessenheim devra fermer. Donc, Flamanville va ouvrir d'ici à 2018. Et donc en effet, Fessenheim devra fermer", a déclaré Ségolène Royal mardi vers 13h, à des journalistes qui l'interrogeaient sur les conséquences pour Fessenheim du report de l'ouverture de l'EPR de Flamanville.
Comment la polémique a-t-elle enflé ? La plupart des observateurs ont interprété cette déclaration comme une annonce de report de la fermeture de Fessenheim. Celle-ci, selon une promesse de campagne de François Hollande répétée en mars dernier, est prévue d'ici la fin du quinquennat, c'est-à-dire 2017. Or, l'ouverture de l'EPR de Flamanville est prévue, elle, pour fin 2018. Une fois la phrase relayée dans les médias, les écologistes n'ont d'ailleurs pas tardé à dégainer. "Ségolène Royal a trahi la promesse présidentielle en annonçant ça tout de go. Je suis consternée", a ainsi réagi Emmanuelle Cosse, la patronne d'Europe-Ecologie-Les Verts, au micro d'Europe 1. "Un président de la République qui ne tient pas sa promesse ne doit pas s'étonner que les écologistes ne le suivent plus", a-t-elle renchéri. "Désolé mais dire qu'on attend l'ouverture du désastreux EPR pour fermer Fessenheim, c'est prendre les écolos pour des cons", a ajouté dans un tweet Jean-Luc Bennahmias.
Même la ministre allemande de l'Environnement s'est dite "très déçue" et a rappelé mardi s'être adressée "à plusieurs reprises à (s)a collègue française, pour plaider pour un arrêt le plus rapide possible de cette vieille centrale".
Comment a réagi Hollande (Et Royal ?) ? Très vite, "l'affaire" a mis l'Elysée en fusion. Les équipes de François Hollande ont été prises d'assaut par les journalistes. Vers 19h, une "source gouvernementale" citée par l'AFP a mis fin au "couac" : la fermeture de Fessenheim "d'ici à la fin" du quinquennat "reste l'objectif". Selon nos informations, François Hollande a lui-même téléphoné à Ségolène Royal pour lui demander de corriger le tir. Ce qu'a tenté de faire la ministre dans un tweet flou, publié vers 18h : "la fermeture de Fessenheim n'est pas reportée, elle doit être organisée dans le cadre de la nouvelle loi. Il n'y a aucun sujet de polémique".
Au final, y a-t-il un "sujet de polémique" ? Ségolène Royal "n'a pas parlé de 2018 pour la fermeture de Fessenheim", a assuré la source citée par l'AFP. En effet, la ministre n'a jamais cité de date à proprement parler. Elle s'est contentée d'évoquer une mesure de la loi sur la Transition énergétique : la France ne doit pas dépasser un certain plafond de production d'électricité nucléaire (60 GW). Ce plafond implique que si une nouvelle centrale ouvre, une autre doit fermer. Mais celle qui doit fermer peut être fermée AVANT l'ouverture de la nouvelle. En d'autres termes, selon la loi, lorsque Flamanville ouvrira, fin 2018, Fessenheim devra fermer… ou déjà être fermée.
Il n'empêche : la formulation de la ministre était bel et bien floue, et pouvait laisser croire à un report. Pour éviter toute ambiguïté, elle n'aurait pas dû dire "quand Flamanville ouvrira, Fessenheim devra fermer" mais "Quand Flamanville ouvrira, Fessenheim devra ÊTRE fermée".
Fermer Fessenheim en 2017, est-ce réalisable ? Pour l'heure, la fermeture de Fessenheim d'ici à l'élection présidentielle, qui aura lieu au printemps 2017, reste encore possible. Mais le gouvernement ne doit pas perdre de temps, car cela ne se fait pas d'un claquement de doigt. Selon une source proche du dossier contactée par Europe 1, rien que pour le volet administratif, il y en a pour au moins un an et demi de démarches.