La fin de la Nupes doit-elle désormais être envisagée? La question pourra plus que jamais se poser cette semaine lors des universités d'été de rentrée des quatre formations de gauche, qui verront si elles peuvent dépasser leurs multiples points de désaccord. Les socialistes à Blois, les écologistes au Havre, les communistes à Strasbourg et les Insoumis près de Valence : chacun va lancer de son côté, mais en même temps, cette nouvelle saison politique.
"Les universités d'été ont des logiques identitaires pour les partis : le jeu, c'est d'attirer l'attention sur soi. Elles donnent le tempo pour la rentrée. La question de la Nupes va forcément être abordée, elle est incontournable", explique le politologue Rémi Lefebvre, estimant qu'il est "fort probable que certains leaders ne jouent pas l'apaisement". La saison politique 2023/2024 qui se dessine sera notamment rythmée par deux élections: les sénatoriales de septembre puis les européennes de juin.
LIRE AUSSI >> Les européennes, simple tremplin ? "Ce ne sont pas des élections faites pour peser en 2027", juge Sophie Bussière
Un "double langage" au sein de la Nupes ?
Deux pierres d'achoppement pour l'alliance de gauche. Récemment, malgré la pause estivale, Jean-Luc Mélenchon et Manuel Bompard ont encore dénoncé le "double langage" de leurs alliés, Manuel Bompard allant jusqu'à accuser l'acte II de la Nupes d'être "bloqué par le refus de (leurs) partenaires d'avancer". Dans leur viseur notamment, une alliance excluant LFI pour la première échéance et la désignation par les Verts et les communistes de leurs propres chefs de file pour la seconde.
L'occasion d'une passe d'armes sur X (ex-twitter) entre Olivier Faure et Jean-Luc Mélenchon, d'où il est ressorti que les liens entre les deux dirigeants de gauche sont actuellement inexistants. "On a le sentiment que LFI part du principe que tout cela est terminé et qu'ils veulent faire porter le chapeau aux partenaires", estime auprès de l'AFP un responsable communiste. Autre dissonance, plus symbolique : le traitement réservé au rappeur Médine, invité jeudi aux universités d'été d'Europe Ecologie - Les Verts et samedi à celles de La France insoumise.
Si son invitation, entachée par des accusations d'antisémitisme, a jeté le trouble chez les Verts, mettant ainsi la pression sur Marine Tondelier, elle semble être beaucoup mieux passée chez les Insoumis. "Médine n'est pas raciste", a assuré Jean-Luc Mélenchon, en ciblant les "soumis au qu'en-dira-t-on des hypocrites" qui se trouvent parmi les "opposants" au macronisme. Nul doute que l'accueil réservé au rappeur au Havre et près de Valence sera bien différent.
"Attaque au bazooka"
Malgré ces tensions palpables - "toute critique est prise comme une attaque au bazooka" regrette le responsable communiste - les différents partis ont pris soin de s'inviter mutuellement à leurs universités d'été et à la Fête de l'Humanité, l'autre temps fort communiste de la rentrée. Au programme notamment, plusieurs conférences portant sur l'avenir de la gauche, notamment une séance aux "AmFis" de LFI intitulée "Un nouveau souffle pour la NUPES !", et regroupant un représentant des quatre principaux partis de la Nupes, que le leader communiste Fabien Roussel trouvait "dépassée" dès le mois d'avril.
Peut-être cette conférence donnera-t-elle un aperçu du séminaire de rentrée prévu en septembre pour les députés de la Nouvelle union populaire écologique et sociale, autour de Julien Bayou (EELV), Benjamin Lucas (Génération-s) , Jérôme Guedj (PS), Elsa Faucillon (PCF) et Danielle Simonnet (LFI). L'occasion peut-être de relancer la version parlementaire de cette alliance, qui est, de l'avis général, celle qui a le mieux marché.
"L'union de la gauche n'est pas née avec la Nupes. Ce n'est pas en reproduisant ce qu'elle a été en 2022 que la gauche gagnera: il faut inventer une autre forme d'union, pour franchir un saut qualitatif", estime le responsable communiste. Avec l'examen prévu à l'automne sur le projet de loi sur l'immigration, la gauche va chercher à oublier ses divisions pour mieux marquer son opposition au gouvernement.
Une sérénité dont les partis auront besoin même en interne: au sein du Parti socialiste, Carole Delga, présidente PS de la région Occitanie farouchement opposée à la Nupes, boudera le rendez-vous.