Délinquance juvénile, arriéré judiciaire, surpopulation carcérale : le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, s'est livré vendredi dans l'Hérault au jeu des questions réponses avec des citoyens, se félicitant d'une justice qui va mieux grâce à des moyens accrus, mais reconnaissant qu'il restait beaucoup à faire. À l'invitation du député macroniste local Patrick Vignal, le ministre de la Justice s'est fait pédagogue pendant deux bonnes heures, devant quelque 200 personnes réunies dans la salle polyvalente de Mudaison, une commune proche de Montpellier.
Les débats, policés, ont pris la forme d'une série de "QAGC" (Questions au gouvernement par des citoyens), sur le modèle des QAG par les députés à l'Assemblée nationale. Préparées à l'avance, les questions ont été posées par le père d'un adolescent agressé dans la rue, un représentant des policiers municipaux, une responsable d'agence immobilière ou une avocate membre du Jeune barreau de Montpellier. "Le ministère de la Justice est le ministère du malheur, il a vocation à intervenir en aval, pas en amont" des crimes et délits, a expliqué de sa voix grave l'ancien avocat.
"La justice, ça ne peut pas se régler à coups de matraque"
Mais "la justice ne peut pas tout réparer et souvent les victimes sortent avec une sorte de frustration", a reconnu le garde des Sceaux, en soulignant qu'il lui était impossible d'intervenir sur des cas particuliers ou de commenter des décisions de justice, par essence indépendante du pouvoir politique. Eric Dupond-Moretti a au passage évoqué une entente "meilleure que jamais" entre lui-même et le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, autre poids lourd du gouvernement.
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"Nous avons embauché des policiers supplémentaires, nous allons recruter 1.500 magistrats et 1.800 greffiers, mais cela prend du temps", a expliqué le ministre à ceux qui dans l'assistance trouvaient que la justice ne répond pas aux attentes des citoyens. En début de journée, l'ex-ténor du barreau avait passé plusieurs heures au tribunal judiciaire de Béziers dans l'Hérault, où des moyens supplémentaires ont permis de commencer à résorber l'arriéré judiciaire, c'est-à-dire les dossiers en retard, en matière de divorce notamment, et où cette juridiction fonctionne selon lui à présent "très bien".
"Je reproche à certains de n'avoir aucune nuance. La justice, ça ne peut pas se régler à coups de matraque. Ceux qui parlent de 'zéro délinquance', s'ils viennent au pouvoir, ils n'y arriveront jamais", a aussi déclaré Eric Dupond-Moretti, une allusion à ses adversaires d'extrême droite, forts dans cette région du sud de la France, mais qui ne se sont pas manifestés à cette occasion.