Le suspense est arrivé à son terme. Emmanuel Macron a donc nommé l'ex-commissaire européen de droite et ancien ministre Michel Barnier pour occuper le poste à Matignon. De la dissolution surprise de l'Assemblée nationale à la nomination après 60 jours de crise de Michel Barnier comme Premier ministre, retour sur les moments clés d'une période politique inédite dans l'histoire de la Ve République.
9 juin : Emmanuel Macron annonce la dissolution de l'Assemblée
Au soir des élections européennes, le 9 juin 2024, le Rassemblement national, emmené par Jordan Bardella, sort très largement en tête des suffrages avec 31,37%, loin devant la liste du camp présidentiel portée par Valérie Hayer (14,6%) et de la liste socialiste (13,83%). Alors que le RN célèbre sa victoire, Emmanuel Macron fait une allocution aux Français. Quelques minutes après la diffusion des premières estimations, le chef de l'État annonce depuis l'Élysée la dissolution de l'Assemblée nationale.
Emmanuel Macron justifie cette décision par la "montée des nationalistes", raison pour laquelle il faut "redonner" aux Français "le choix de notre avenir parlementaire".
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13 juin : naissance du Nouveau Front populaire
Rapidement, les partis de gauche scellent une alliance sous la bannière du Nouveau Front populaire (NFP). Le Parti socialiste, La France insoumise, Les Écologistes et le Parti communiste français s'engagent, le 13 juin, sur un programme commun "de rupture".
À droite, le président des Républicains (LR) Éric Ciotti s'allie avec le RN sans concertation interne. Isolé, exclu par son propre bureau politique, il s'accroche à son poste, bouclant même à clé, pendant quelques heures, le siège du parti gaulliste.
30 juin : le RN arrive en tête du premier tour des législatives
Au premier tour des législatives et avec un taux de participation de 67,5%, le Rassemblement national arrive de nouveau en tête (33,1%) devant le Nouveau Front populaire et le camp présidentiel. Suite à ces résultats, le président de la République a appelé à un "largement rassemblement clairement démocrate et républicain" face au RN.
Jean-Luc Mélenchon indique qu'en cas de triangulaire et si LFI est arrivée 3e, "nous retirerons notre candidature". C'est la naissance d'un "front républicain". Le 2 juillet, plus de 200 candidats du NFP ou du camp macroniste se désistent en faveur des mieux placés pour barrer la route à l'extrême droite.
7 juillet : surprise générale
La stratégie fonctionne : le Nouveau Front populaire sort en tête du second tour, obtenant 193 députés à l'Assemblée nationale, devant les macronistes qui résistent avec 166 députés. Le RN se renforce (123 élus et trois apparentés, contre 89 auparavant) mais reste loin du pouvoir. Aucun des trois blocs n'approche de la majorité absolue de 289 députés. La France entre dans l'inconnue politique.
10 juillet : l'appel de Macron
Après avoir refusé la démission du Premier ministre Gabriel Attal (finalement acceptée le 16), Emmanuel Macron demande aux "forces politiques républicaines" de "bâtir une majorité solide" pour gouverner, scandalisant la gauche qui revendique Matignon.
Deux personnalités renoncent à gauche
Le Nouveau Front populaire se démène pour trouver une personnalité qui serait susceptible de pouvoir accéder à Matignon. Le 14 juillet, la présidente de la région La Réunion, Huguette Bello, renonce à devenir candidate au nom du NFP pour Matignon, sur fond de désaccords entre LFI et PS. Une semaine plus tard, c'est au tour de l'économiste et diplomate du climat Laurence Tubiana, proposée par le PS, de jeter l'éponge.
18 juillet : Yaël Braun-Pivet réélue au perchoir
Le 18 juillet, Yaël Braun-Pivet, présidente sortante de l'Assemblée, est réélue au troisième tour de scrutin avec 220 voix, grâce à une entente entre droite et macronie, face au candidat de la gauche André Chassaigne (PCF) avec 207 voix et Sébastien Chenu (RN) qui en a récolté 141. Un résultat vu comme le "summum du déni démocratique", par le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure. Sébastien Chenu avait dénoncé une "victoire des combines".
Deux jours plus tard, le camp présidentiel obtient six des huit présidences de commission tandis que l'Insoumis Éric Coquerel retrouve la présidence de la commission des Finances. Le NFP est majoritaire au Bureau de l'Assemblée, plus haute autorité collégiale du Palais-Bourbon.
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23 juillet : Lucie Castets candidate du NFP pour Matignon
Après 16 jours de négociations entre les différents partis, le Nouveau Front populaire s'est mis d'accord pour proposer à Emmanuel Macron le nom de Lucie Castets pour occuper le poste de Premier ministre. La haute-fonctionnaire, engagée dans la défense des services publics, fait ensuite activement campagne. Mais dans une interview télévisée, Emmanuel Macron balaie l'hypothèse : "La question n'est pas un nom, c'est quelle majorité peut se dégager pour qu'un gouvernement puisse passer les réformes, passer un budget et faire avancer le pays".
Le président précise dans cette interview qu'il ne nommerait pas de nouveau gouvernement avant la "mi-août", avant la fin des Jeux olympiques de Paris 2024.
26 août : l'option Lucie Castets écartée
À partir du 23 août, Emmanuel Macron engage des consultations avec l'ensemble des forces politiques avec pour objectif de sortir la France de cette crise politique et de trouver un nouveau Premier ministre. Il commence par recevoir Lucie Castets et les responsables du Nouveau Front populaire à l'Élysée, avant de recevoir les autres partis politiques, dont le RN et le camp présidentiel. Il écarte finalement le 26 août l'option d'un gouvernement mené par Lucie Castets, au nom de "la stabilité institutionnelle". Fureur du NFP qui appelle à la mobilisation face au "déni de démocratie".
27 août : nouvelles consultations lancées par le chef de l'État
Le chef de l'État lance le 27 août de nouvelles consultations, sans LFI ni le RN. L'hypothèse d'une nomination de l'ex-Premier ministre de François Hollande, Bernard Cazeneuve agite la gauche. Il est reçu le 2 septembre par Emmanuel Macron ainsi qu'un autre candidat potentiel, Xavier Bertrand, ex-ministre de Nicolas Sarkozy et président des Hauts-de-France.
Circuleront également le nom du président du Conseil économique, social et environnemental, Thierry Beaudet, de l'ancien commissaire européen Michel Barnier ou encore celui du maire de Cannes et président de l'Association des maires de France (AMF), David Lisnard.
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5 septembre : Michel Barnier nommé Premier ministre
Le 5 septembre, soixante jours après le second tour des législatives, Emmanuel Macron nomme l'ex-ministre et ancien commissaire européen de droite Michel Barnier. Il devient la 27e personnalité politique a occupé ce poste depuis la création de la fonction en janvier 1959. À 73 ans, Michel Barnier devient le plus vieux Premier ministre de la Ve République, effaçant des tablettes Pierre Bérégovoy qui avait 67 ans lorsqu'il quitta Matignon en 1993.
Il est le successeur du plus jeune Premier ministre, Gabriel Attal, qui avait 34 ans lors de sa nomination. Il a occupé le poste pendant six mois et sept jours jusqu'à la démission de son gouvernement le 16 juillet dernier.