Est-ce un effet de la gifle reçue par Manuel Valls ? Il n’y a eu ni agressivité ni éclats de voix jeudi soir, mais un débat de fond, plus concernant, où l’on a vu se dessiner différents projets et une appartenance commune : la famille de gauche. C’est une gauche de gouvernement qui a tenté de s’imposer, une gauche responsable avec des valeurs partagées : sur la sécurité sociale, sur la lutte contre la précarité, sur des questions de société aussi, comme la fin de vie ou la lutte pour l’égalité homme-femme.
Réalisme et utopie. Une divergence majeure a structuré le débat : c’est la question économique autour du revenu universel défendu par Benoît Hamon et de la maîtrise des déficits. Pour résumer, c’est une gauche qui veut faire rêver face à une gauche réaliste, convertie à la maîtrise des déficits, c’est Manuel Valls, Vincent Peillon ou François de Rugy face à Benoit Hamon, Arnaud Montebourg essayant quant à lui de jouer une sorte de troisième voie, à cheval sur ces deux gauches.
Des candidats qui sortent grandis. Ils ne seront peut-être pas les vainqueurs de dimanche mais, sur l’ensemble des trois débats, les principaux gagnants sont ceux qui se sont le mieux préparés, depuis longtemps. Avant ces débats, Benoît Hamon souffrait d’un déficit de notoriété : qui connaissait Monsieur Hamon en dehors du parti ? Pas grand monde. Aujourd’hui, tous les Français connaissent le candidat du revenu minimum. On avait laissé Arnaud Montebourg à Frangy avec sa cuvée du redressement, ruant dans les brancards, on le retrouve sérieux, sans outrance, prenant de la hauteur. Arnaud Montebourg est sorti de l’adolescence, on le découvre adulte et crédible. Enfin Manuel Valls, ça a été dur pour lui, mais le brutal s’est arrondi, il s’est "gauchi" et ça ne lui va pas mal. Jeudi soir, il avait trouvé le bon dosage entre autorité et humanité.
Face à Macron. À l’approche du dénouement, c’est aussi le match d’après qui se met déjà en place : la confrontation avec Jean-Luc Mélenchon et surtout Emmanuel Macron. L’ancien protégé de François Hollande n’a pas voulu participé à la primaire, mais il s’y est invité, il s’y est imposé. Et il est d’ailleurs, par son omniprésence, un facteur d’unité et de rassemblement des candidats. Pourquoi ? Parce qu’ils savent que ce qui les attend après la primaire, pour celui qui sera désigné, s’annonce comme un duel autrement plus musclé et sans doute plus mortel que celui qu’ils jouent en ce moment.