Emmanuel Macron a pris l’initiative de bouleverser les usages républicains en convoquant le Congrès dès le début de la session parlementaire. Au-delà des commentaires sur le président en majesté, qui impose son pouvoir, il entre, qu’on le veuille ou non, dans l’arène. Il s’expose en première ligne en lieu et place du Premier ministre, c’est une prise de risque politique. On le mesurera physiquement avec le nombre de chaises vides des parlementaires refusant de répondre à la convocation du chef de l’Etat, on peut y voir un geste discourtois de leur part, mais c’est aussi une façon de braver son autorité.
Une démonstration d'autorité qui passe mal. Ni François Hollande au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, ni Nicolas Sarkozy en 2009, à l’occasion d’un discours sur la crise en Europe, n’avait été boycotté par des parlementaires de l’opposition. Bien sûr, les contextes ne sont pas les mêmes, à ceci près que c’est à la seule initiative du chef de l’Etat que le Parlement est ainsi convoqué. Le président Macron, en inscrivant son discours dans un rapport d’autorité vis-à-vis d’un parlement auquel il annonce son cap, sa feuille de route, s’expose à la riposte de l’opposition qui jusqu’ici avait du mal à l’atteindre.
Un angle d'attaque pour l'opposition. Les parlementaires présents à Versailles ne peuvent pas répondre, il n’y a pas de confrontation directe, d’interpellation possible du président. Toutefois, les groupes politiques s’exprimeront une fois Emmanuel Macron parti : pour abonder ou critiquer. Mais surtout, la vraie riposte viendra 24 heures après, mardi après-midi à l’Assemblée nationale, après le discours de politique générale du Premier Ministre. Jean-Luc Mélenchon, qui boycotte le discours versaillais du président, et Marine Le Pen, qui elle sera au Congrès, s’adresseront depuis l'hémicycle du Palais Bourbon au Président Macron, lui adressant leurs réponses et faisant fi du discours de politique générale d’un Premier ministre éclipsé.
Avec ce Congrès Emmanuel Macron met en jeu son autorité et prive Edouard Philippe d’un des actes essentiels de la fonction de chef du gouvernement, une brèche dans laquelle l’opposition ne va pas manquer de s'engouffrer. Ce sera la première confrontation entre l'exécutif et le pouvoir législatif.