D'où vient la colère qui s'exprime depuis l'automne dernier au travers de la crise des "gilets jaunes" ? Si la racine de nombreux problèmes est très profonde, notre éditorialiste Jean-Michel Aphatie estime que la dernière élection présidentielle n'a pas permis de débattre et trouver des solutions à cette situation. La faute notamment à l'affaire Pénélope et François Fillon, alors que ces derniers viennent d'être renvoyés mardi devant le tribunal correctionnel.
"Aujourd'hui, il reste de l'affaire Fillon des sentiments très négatifs qui nous perturbent beaucoup. Peut-être que nous n'en n'avons pas vraiment conscience. L'affaire éclate fin janvier 2017 : nous sommes à trois mois du premier tour de l'élection présidentielle et Le Canard enchaîné révèle que Pénélope Fillon a été payée pendant des années par son mari à l'Assemblée nationale. On n'est pas sûr qu'en contrepartie, elle ait fourni un travail. C'est ce qui vaut à l'ancien Premier ministre un renvoi devant le tribunal correctionnel pour détournement de fonds publics.
Frustration collective
Quand cette affaire éclate, François Fillon est le favori de l'élection présidentielle. C'est lui qui aurait dû aller à l'Élysée. Cette affaire coupe son élan, l'empêche de faire campagne et ça ouvre la voie à Emmanuel Macron.
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Qu'est-il resté de tout ceci ? Une immense frustration collective et le sentiment qu'on nous a pratiquement volé l'élection présidentielle 2017, que le débat sur l'état de la France n'a pas pu avoir lieu, que nous n'avons pas pu évoquer les problèmes du pays et les solutions pour y remédier. Cette frustration, on l'a retrouvée intacte et forte dans le grand débat, qui a été l'inventaire des problèmes de la France. Ç'a été en quelque sorte le remède à l'élection présidentielle et à son débat que nous n'avons pas eu.
Pendant le grand débat, nous avons fait la liste des problèmes qui existent en France - ils sont nombreux, importants et divers - mais la frustration supplémentaire que provoque le grand débat est que ça ne débouche pas sur une élection. Il n'y a pas de choix électoral, il y a juste un homme qui va nous dire 'ça oui, ça non', jeudi. Ça rajoute au malaise démocratique parce qu'on voit bien que la mécanique ne fonctionne pas. C'est ce qu'il nous reste de l'affaire Fillon.
Son renvoi en correctionnelle ? "Mérité"
Il faut bien analyser la séquence des "gilets jaunes" que l'on vient de vivre : pour une part, le rejet spectaculaire et parfois irrationnel dont a été victime Emmanuel Macron s'enracine dans ses sentiments-là, dans cette frustration née de l'affaire François Fillon.
François Fillon était un homme d'État, quelqu'un qui a toujours voulu servir son pays mais, en salariant sa femme comme il l'a fait, il ne nous a pas rendu un vrai service. Je le dis avec tristesse ce matin parce que j'ai toujours eu beaucoup de respect pour François Fillon, pour l'homme politique qu'il a été, mais à bien des égards, son renvoi en correctionnelle est mérité."