Gérard Collomb passe à la défense. Le ministre de l'Intérieur, auditionné lundi matin par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale, s'est défendu de tout manquement personnel dans l'affaire Benalla. L'ancien maire de Lyon a estimé que ce n'était pas à lui de saisir la justice de ces actes violents, qu'il a de nouveau condamnés "avec la plus grande fermeté". Le ministre a renvoyé la responsabilité d'éventuels manquements au préfet de police et au cabinet d'Emmanuel Macron.
"Je m'étais assuré le 2 mai que, tant le cabinet du président de la République que la préfecture de police, avaient été destinataires de l'information de la vidéo mettant en cause Alexandre Benalla. Il leur appartenait donc d'agir. C'est la règle pour tous les manquements", a fait valoir Gérard Collomb.
Les trois infos à retenir
- Le ministre s'est défendu de n'avoir pas saisi la justice après avoir été informé des actes d'Alexandre Benalla
- Il a également assuré n'avoir "jamais évoqué la situation d'Alexandre Benalla" avec le président de la République
- Gérard Collomb affirme n'avoir "jamais été informé" du rôle de Benalla lors du 1er mai
Collomb se défend de ne pas avoir saisi la justice
Gérard Collomb s'est expliqué sur la journée du 2 mai, quand il a été informé des agissements du collaborateur d'Emmanuel Macron. "Ce n’est qu’en rentrant au ministère, en début d’après-midi (le 2 mai), que mon chef de cabinet m’informe de l’existence d’une vidéo et de l’implication d’Alexandre Benalla", a-t-il déclaré. "La personne qui aurait averti mon directeur de cabinet est le chargé de mission des réseaux sociaux à l'Élysée, qui a vu la vidéo", a détaillé Gérard Collomb, plus tard lors de l'audition.
"J’ai ensuite informé le cabinet de la présidence de la République. Plus tard, mon cabinet est informé qu’une sanction sera prise contre monsieur Benalla. Comme il ne dépend pas de ma hiérarchie, je ne me suis plus occupé de ce dossier", a-t-il poursuivi.
Le ministre s'est également défendu de ne pas avoir saisi la justice après avoir été informé des faits, comme le dispose l'article 40 du Code de procédure pénale. "On m’a reproché de ne pas avoir saisi le procureur de la république en vertu du code de procédure pénale à la vue de la vidéo concernant Alexandre Benalla. Mais ce n’est pas au ministre qu’il appartient de le faire", s'est-il justifié. "Je vous rappelle que je m’étais assuré que le cabinet de la présidence de la République et la préfecture de police avaient été destinataires de l’information. Il leur appartenait d’agir, c’est la procédure", a poursuivi Gérard Collomb.
Affaire Benalla : Gérard Collomb "le cabinet du président de la République et la @prefpolice ayant été averti de l'existence de la vidéo mettant en cause M. #Benalla, il leur appartenait donc d'agir" >> https://t.co/PuE92LcKIO#DirectAN Cc @Elysee@gerardcollombpic.twitter.com/B9pYGPnooq
— LCP (@LCP) 23 juillet 2018
Le ministre a parlé "le moins possible" de l'affaire avec le président
Le ministre de l'Intérieur a assuré qu'il ignorait qu'Alexandre Benalla était conseiller d'Emmanuel Macron. "Je l’avais rencontré mais j’ignorais sa qualité de conseiller du président de la République. Personnellement je ne le connaissais pas, je croyais même qu'il faisait plutôt parti des services de police. La dernière fois que j’ai croisé Alexandre Benalla, ce devait être à l’occasion de la Coupe du monde de football". "Je l'ai rencontré lors des campagnes électorales, comme des dizaines de personnes", a-t-il précisé un peu plus tard.
"Je n’ai jamais évoqué la situation d'Alexandre Benalla avec le président de la République. Je lui ai parlé après les émeutes (du 1er mai), et je l’informais de la violence des événements, alors qu’il était en déplacement en Australie. A ce moment-là, personne n’était au courant de la vidéo". Gérard Collomb a également confirmé avoir rencontré Emmanuel Macron le week-end dernier. "J’ai rencontré le président, oui. Avons-nous parlé des faits ? Oui, le moins possible. Le président était davantage préoccupé par l’avancée de la réforme constitutionnelle", a raconté le ministre, provoquant de vives réactions chez les députés.
Affaire Benalla : Gérard #Collomb répond à Eric Ciotti
— LCP (@LCP) 23 juillet 2018
"Oui j’ai rencontré le président de la République.
Avons-nous parlé des faits ?
Le moins possible…" @gerardcollomb >> https://t.co/PuE92LcKIO#DirectAN#Benallapic.twitter.com/WYObHNajIj
Collomb n'a "jamais été informé" du rôle de Benalla le 1er mai
Gérard Collomb a également expliqué ne pas avoir été prévenu avant le 1er mai de la présence d'Alexandre Benalla et de Vincent Crase comme observateurs avec la police. "Je n'ai jamais été informé. Je n'ai constaté qu'a posteriori qu'effectivement les deux observateurs (...) étaient présents sur les lieux et s'étaient rendus ensuite, d'ailleurs de manière à mon avis inopportune, dans la salle de commandement où j'étais allé regarder avec le préfet de police la suite des opérations".
Mais alors, qui a autorisé Alexandre Benalla à se rendre sur place le 1er mai ? "Je n'en sais rien", a balayé d'un revers de main Gérard Collomb. "Le préfet de police devait être au courant. Le chef d’état major était au courant qu'il devait participer en tant qu'observateur. Il a été accueilli le matin du 1er mai et lui a été remis un casque de protection", a-t-il déclaré, avant de rectifier sa réponse quelques minutes plus tard. "La préfecture de police était sans doute informée, pas forcément le préfet lui-même."
Un port d'armes délivré à Benalla par le préfet de police
Alexandre Benalla a été autorisé à porter une arme "par un arrêté du préfet de police", sans que le cabinet du ministre de l'Intérieur "n'en ait été avisé", a déclaré Gérard Collomb. Le ministère de l'Intérieur, sollicité à plusieurs reprises (2013, janvier 2017 et juin 2017) par le conseiller d'Emmanuel Macron, a refusé toutes ses demandes de port d'arme car "il ne remplissait pas les conditions requises", a précisé le ministre.
"Toutefois, par un arrêté du préfet de police du 13 octobre 2017, Alexandre Benalla s'est vu délivrer une autorisation de port d'arme sur un autre fondement du code de la sécurité intérieure, sans que mon cabinet n'en ait été avisé. Je l'ai découvert mercredi dernier", a-t-il assuré. "En outre, Alexandre Benalla avait été autorisé par le préfet de police au moment de la campagne, à détenir une arme uniquement dans les locaux du siège de la campagne. Cette autorisation a expiré", a-t-il conclu.
Et maintenant ?
Après Gérard Collomb, ce sera au tour du préfet de police Michel Delpuech d'être auditionné à l'Assemblée, à partir de 14h. Le ministre de l'Intérieur sera également entendu par le Sénat, mardi. Par ailleurs, le rapport de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) sur l'affaire Benalla devrait être remis "à la fin de cette semaine", a affirmé lundi le président de l'Assemblée nationale François de Rugy.