Emmanuel Macron a inauguré samedi, un peu avant 9h, le Salon de l'Agriculture, porte de Versailles, à Paris. Et c'est en Européen que le chef de l'État entendait fouler les allées de "la plus grande ferme de France". Car plus que les maux du monde rural, qu'il juge avoir abordés dans ses grands débats, le chef de l'État a consacré son discours inaugural à sa vision de la future politique agricole commune.
Les principales infos à retenir :
- Emmanuel Macron a inauguré le Salon de l'Agriculture samedi matin
- Le président a vanté, dans un discours, les bienfaits de la politique agricole commune
- Il a passé plus de quatorze heures au Salon, battant son propre record, lors d'une visite sans couac.
"Sans l'Europe, l'agriculture française ne serait pas la même"
Après une brève introduction sur les premières avancées obtenues avec la loi Alimentation, Emmanuel Macron a développé l'importance de la politique agricole commune. "L’avenir des terroirs français passe par une politique européenne pragmatique et ambitieuse. Sans l'Europe, l'agriculture française ne serait pas la même", a estimé le président de la République devant environ 500 personnes, pour moitié des jeunes agriculteurs venus de pays européens, mais également le commissaire européen à l'Agriculture Phil Hogan et le négociateur européen Michel Barnier.
"L'Europe agricole est un bien précieux qu’il nous faut protéger". Mais le président a aussi alerté sur les divisions initiées par ceux qui veulent renationaliser la PAC. "L'Europe agricole est menacée de l'extérieur", notamment face aux grandes puissances comme la Russie, la Chine ou les États-Unis, et "de l'intérieur", mais elle reste "un bien précieux qu’il nous faut protéger", a martelé le chef de l'État. "On peut critiquer certains aspects de la politique européenne mais sans la PAC, les consommateurs européens ne bénéficieraient pas d’une alimentation accessible et de qualité", a affirmé le chef de l'État.
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"Notre défi n’est pas de liquider l’héritage de 60 ans de PAC mais de la réinventer. C’est pour moi une question de souveraineté alimentaire, environnementale et industrielle", a ensuite souligné le président de la République. Selon lui, la future PAC devra tenir "trois promesses" : "protection des agriculteurs et des consommateurs", "transformation du modèle vers plus de valeurs et d’écologie" et "accélération de la recherche et renouvellement des générations".
Vers une agriculture plus respectueuse de l'environnement. Par ailleurs, Emmanuel Macron a appelé les agriculteurs à "devenir les premiers militants de la transition écologique". Et le président d'affirmer que, par exemple, "nous pouvons faire du vignoble français le premier vignoble sans glyphosate du monde". Dans ce cadre, il a aussi souligné que la prochaine PAC devrait consacrer une "part significative" à l'environnement, en rémunérant notamment les "services environnementaux" rendus par les agriculteurs.
Imminence, lait, viande et bière
Après son discours, Emmanuel Macron a échangé avec les jeunes agriculteurs européens présents sur place. Vers 10h30, le président a entamé sa visite marathon du salon, qui devait durer toute la journée. Il est ensuite allé saluer Imminence, vache de race Bleue du Nord, égérie du salon. Voyant la bête s'asseoir à ses pieds, Emmanuel Macron s'est même enquis de savoir si elle était fatiguée. Le chef de l'État avait un programme chargé puisqu'il devait se rendre, dans l'ordre, sur les stands des filières lait, viande bovine, volailles, œufs, porc, pêche, pomme de terre, viticulture, fruits et légumes, grandes cultures et bière.
Des agriculteurs en attente de réponses. De nombreux agriculteurs présents au Salon espéraient aborder le président pour exposer leurs attentes, qui vont des services publics dans le monde rural à l'évolution des prix. L'an dernier, Emmanuel Macron avait passé douze heures d'affilée dans les allées, répondant à aux visiteurs, y compris les plus hostiles. Cette année, Emmanuel Macron craignait de devoir se confronter aux "gilets jaunes" : Éric Drouet, l'un des leaders du mouvement, était présent au salon à l'ouverture. "Le dialogue a été rompu il y a un certain temps" et "on voulait voir si on pouvait s'approcher du président", a-t-il expliqué. Réponse : non. Finalement, il a quitté le salon pour rejoindre la mobilisation des "gilets jaunes" dans le centre de Paris
Le président a aussi rencontré de jeunes agriculteurs. "L'état d'esprit de votre génération doit être positif. Je suis le premier à dénoncer les problèmes. Mais il faut que vous, la jeunesse, soyez dans un état d'esprit positif, sinon on est forcément foutus", leur a-t-il dit.
A l'issue de son déjeuner, le président a rencontré Patrick Maurin, élu local de Marmande, dans le Lot-et-Garonne, qui voulait lui remettre un cahier de "doléances" collectées pendant une marche entre Le Touquet, villégiature des Macron et Paris, exprimant la détresse morale du monde agricole, et alertant sur la question du suicide des agriculteurs.
Plus tard dans la journée, Emmanuel Macron a échangé avec des éleveurs de vache Gasconne, et abordé la question du loup. "Le loup on va le réguler. On va le faire de manière pragmatique, sur le terrain. Les ministères ont trouvé un accord. On va le réguler avec les préfets", a-t-il déclaré.
Une visite très cadrée, sans couac
La visite d'Emmanuel Macron s'est déroulées sans accroche. Le président a été interpellé à maintes reprises par des agriculteurs inquiets pour leur avenir mais aussi par des visiteurs. "J'arrive !", "On ne vous lâche pas" : plutôt que de "tâter le cul des vaches", selon la formule de Jacques Chirac, le chef de l'État a pris le temps de répondre aux nombreuses sollicitations. "Il faut expliquer et entendre", a-t-il expliqué devant les caméras. Le premier moment émouvant a eu lieu peu après 11h, quand un retraité, père de quatre enfants, a tendu au chef de l'État sa feuille de pension, assurant qu'il ne vivait plus avec ses 600 euros mensuels.
Un retraité craque en évoquant ses difficultés avec Emmanuel Macron pic.twitter.com/3IFqln67tU
— BFMTV (@BFMTV) 23 février 2019
Séquence émotion. Emmanuel Macron a pris le document, l'a confié à un conseiller et assuré au retraité qu'une réponse détaillée lui serait fournie. "Mais vous êtes en dessous du minimum vieillesse, parce que vous ne l'avez pas demandé, gardez le moral ; vous avez droit à plus que ce que vous touchez là (…). On va faire notre maximum pour que vous ne perdiez pas de pouvoir d'achat", a assuré le président au retraité qui a alors fondu en larmes dans ses bras.
Le président de la République s'est également vu offrir un chevreau, Désiré, par un éleveur. L'animal rejoindra Agathe et Marianne, les deux poules de l'Elysée, accueillies lors du salon 2018.
À l'inverse, tout élément perturbateur était tenu à l'écart du cortège du chef de l'État. Ainsi, un homme brandissant à bonne distance un gilet jaune avec l'inscription "oui au RIC" a été éloigné promptement du périmètre présidentiel. "Ils m'ont dit (les policiers) que soit je restais dans le salon sans gilet jaune, soit je partais. Et si je revenais, j'étais interpellé", a-t-il confié ensuite à l'AFP, s'identifiant comme Jonathan, 32 ans, venu de l'Essonne. "L'accueil est bienveillant, mais inquiet", a simplement commenté Emmanuel Macron, avant de lâcher : "Je sais d'où viens, je viens d'une terre qui est fière de son agriculture. Je suis né à Amiens, je ne suis pas né à Paris !"
Vers 23h00, le président de la République continuait de déambuler dans les allées du Salon, plus de 14 heures après son arrivée Porte de Versailles. Emmanuel Macron a donc battu son record de l'année dernière, quand il était resté plus de 12 heures auprès des agriculteurs.