Alors que le mouvement #MeToo a touché le monde du cinéma, des élus appellent à une prise de conscience dans les mairies. Mais les progrès sont lents, surtout à droite. Europe 1 a mené l'enquête.
La vague #MeToo va-t-elle toucher les territoires, à quelques semaines des élections municipales ? Tout est parti d'une tribune, signée par des élus et des militants de gauche en novembre dernier sur le site de France Info. L’objectif : dénoncer les violences sexistes et sexuelles au sein des conseils municipaux, et demander la mise à l’écart des "candidats sexistes et responsables de violences". À quelques semaines des élections municipales, les mentalités commencent à changer mais les progrès sont lents, spécialement dans les partis de droite. Europe 1 a mené l'enquête.
A gauche, de vrais progrès
À gauche, le mouvement #MeToo a déjà eu des conséquences. À Firminy, près de Saint-Etienne, les communistes ont lâché leur candidat officiel, condamné pour attouchements. Au PS, la ligne est la même : la commission investiture déclenche systématiquement des enquêtes s'il y a des accusations pour des faits de harcèlement ou d'agression sexuelle à l'encontre d'un candidat. "On n’a pas les moyens d’enquêter sur les uns et les autres. Mais à chaque fois que des faits sont portés à notre connaissance, nous regardons comment réagir, quitte à perdre des bastions dans lesquels nous sommes là depuis longtemps", assure le premier secrétaire Olivier Faure. À Saint-Nazaire, le PS a ainsi gelé l’investiture du maire sortant David Samzun, responsable de ne pas avoir protégé suffisamment des conseillères municipales victimes d’agressions sexuelles.
Chez EELV, le parti met un "point d'honneur à ne pas investir des personnes qui pourraient être mises en cause pour harcèlement ou agression". S'il n'existe pas de dispositif spécifique pour les municipales, le parti, marqué par l'affaire Denis Baupin, a mis en place une cellule de signalement pour les agressions sexistes ou sexuelles. En cas de condamnation par la justice, les écologistes peuvent également sanctionner les membres avec une inéligibilité interne de cinq ans.
"A droite, il ne s’est rien passé"
À La République en Marche, même vigilance. À Villepreux, dans les Yvelines, le maire sortant, qui avait soutenu la campagne d'Emmanuel Macron, est soupçonné de harcèlement sexuel. Présumé innocent, il se représente, sans étiquette, pour un troisième mandat. Mais LREM a choisi de soutenir Jean-Baptiste Hamonic, le responsable du Modem dans le département.
Qu'en est-il à droite ? L'UDI estime qu'il ne faut pas prendre la place de la justice. Mais le maire centriste de Laval François Zochetto a tout de même renoncé en décembre à se représenter, après des accusations d’agression sexuelle qui avaient refait surface dans les médias.
Les Républicains assurent de leur côté qu'au moindre problème ce sera l'exclusion, mais aucun cas n'a encore été signalé pour l'instant. Et pour Hélène Bidart, présidente de l’association "Élues contre les violences faites aux femmes", les partis de droite éprouvent une vraie gêne autour de ces questions. "Sur les agressions sexuelles et sexistes, on retrouve un clivage gauche-droite. Il ne s’est rien passé dans les partis de droite, pas une expression politique de la part des premiers dirigeants. C’est assez inquiétant, parce que certaines personnes doivent souffrir de ce manque de parole", dénonce Hélène Bidart.
Contacté, le Rassemblement National n'a, pour l'instant, donné aucune réponse.
Le cas Georges Tron, un symbole
Les cas les plus compliqués à trancher sont ceux où il n’y a pas de plainte. Où placer le curseur : des blagues lourdes méritent-elles une exclusion, ou est-ce uniquement pour des gestes ou des comportements inappropriés avérés ? Les partis décident au cas par cas.
Autre cas problématique : celui de Georges Tron. Le maire de Draveil, dans l’Essonne, a été acquitté des faits de viol et d’agression sexuelle dont il était accusé par deux collaboratrices. L’ancien secrétaire d’État est actuellement dans l’attente de son procès en appel, et entend bien se représenter pour un cinquième mandat. Cette "zone grise" complique la prise de décision des différents partis, qui doivent arbitrer entre le respect de la présomption d'innocence et l’écoute des victimes.