Éric Dupond-Moretti est un ministre atypique. Trop ? Parmi les macronistes, on craint que le choix du Président de nommer garde des Sceaux l'ex-ténor du barreau ne revienne comme un boomerang. Car les tensions entre la chancellerie et les magistrats se multiplient : ces derniers s'alarment notamment de l'enquête administrative ouverte contre trois magistrats du Parquet national financier (PNF). Mercredi, les syndicats de la magistrature seront reçus à l'Élysée par la conseillère justice d'Emmanuel Macron, signe de l'enjeu politique autour des relations entre le ministre et les magistrats.
Une crise judiciaire qui couve ?
Lorsqu'on pose la question au sommet de l'État, la réponse fuse : c'est vrai qu'il est clivant, mais c'est pour cela qu’il est là. Il doit "faire turbuler le système", comme le dit un proche de Jean Castex. Éric Dupond-Moretti fait partie de ces quelques ministres haut-parleurs, connus pour leur sens du verbe. Dans la majorité, pourtant, on commence à avoir des doutes. Le gouvernement n'a pas besoin d'ajouter une crise judiciaire à la crise sanitaire et économique.
Certains avancent que la hausse de 8 milliards d'euros du budget de la justice en 2021 est inaudible, car le bras de fer entre la magistrature et Éric Dupond-Moretti fait plus de bruit. C'est un peu comme si le haut-parleur Dupond-Moretti avait monté le son trop fort. La polémique sur la réforme envisagée de l'École nationale de la magistrature (ENM) n'arrange rien.
Calmer la fronde avant 2022
Le garde des Sceaux ne compte pas s'amender face à ces débuts difficiles. Éric Dupond-Moretti a bien compris qu’il prendra toute sa place au moment de la campagne présidentielle. L’avocat et homme de théâtre se prend au jeu de la politique et veut mettre sa faconde au service d’Emmanuel Macron.
Mais avant cela, il faut trouver les moyens de calmer le front avec les magistrats mobilisés contre lui. En clair, l’avocat Dupond-Moretti doit trouver la bonne défense pour le garde des Sceaux qu’il est devenu.