De tous les candidats à la primaire de la droite, c'est son favori. Sens Commun, l'association politique fondée par des membres de la Manif pour Tous et intégrée, en décembre 2013, à ce qui s'appelait encore l'UMP à l'époque, a décidé de soutenir François Fillon pour la primaire. Sur son site internet, elle explique avoir "confronté [son] socle aux différents programmes des candidats", en s'attachant à "des points de convergence avec les sujets les plus fondamentaux". Notamment "la famille" et l'abrogation du mariage pour tous, cheval de bataille de l'association.
Fillon béni après la trahison de Sarkozy. Ce soutien de Sens Commun n'a rien de surprenant. Ni Alain Juppé, ni Bruno Le Maire, ni Nathalie Kosciusko-Morizet ne veulent revenir sur la loi Taubira, ainsi que le réclame l'association. Quant à Nicolas Sarkozy, il avait promis, en 2014, d'abroger le texte s'il était élu, avant de changer d'avis au début de l'année. Une véritable trahison pour Sens Commun, qui lui a donc préféré François Fillon. Le député de Paris avait voté contre l'ouverture du mariage aux couples de même sexe en 2013. Aujourd'hui, il appelle à réécrire la loi pour supprimer l'adoption plénière par les couples homosexuels.
Mais j’ai également toujours dit qu’il fallait revoir la question de la filiation et donc de réécrire la #loiTaubira sur l’adoption.
— François Fillon (@FrancoisFillon) 30 juin 2016
Le seul "présidentiable" de la liste. Jean-Frédéric Poisson et Hervé Mariton, deux autres candidats favorables à l'abrogation de la loi Taubira, auraient pu être choisis –et ont d'ailleurs, tous les deux, regretté le "choix incompréhensible" et "l'erreur" de Sens Commun dans Famille Chrétienne. Mais l'association explique avoir voulu soutenir "un candidat susceptible de devenir Président", éliminant de facto ceux qui sont à la traîne dans les sondages.
Fillon, ce centriste... Le choix de Sens Commun, parce qu'il se base aussi sur les idées du candidat en matière "d'identité", de "culture" et de "prospérité économique", en dit long sur le positionnement très à droite de François Fillon au sein de sa famille politique. L'ancien Premier ministre a pourtant pu apparaître, par le passé, comme le tenant d'une ligne "modérée" à droite. Cette image a notamment été forgée en 2012, pendant la campagne pour la présidence de l'UMP qui l'opposait à Jean-François Copé. Ce dernier, chantre de la "droite décomplexée", s'est rué sur des thèmes comme le "racisme anti-blanc", la lutte contre le droit de vote des étrangers ou encore le contrôle de l'immigration. Et n'a pas manqué une occasion de faire passer François Fillon pour un centriste, espérant ainsi remporter l'adhésion d'une base militante décomplexée par la campagne présidentielle.
…qui n'en était pas un. L'image est restée, mais elle est pour le moins réductrice. Certes, François Fillon a bel et bien adopté une attitude souvent plus modérée que Jean-François Copé pendant cette campagne. Auparavant, il s'était démarqué de lui sur certains sujets, notamment les consignes de vote à adopter au deuxième tour des cantonales de 2011 –il avait alors soutenu le front républicain, quand celui qui était alors secrétaire général de l'UMP penchait pour le "ni-ni"– ou encore le discours de Grenoble, en 2010, avec lequel il avait pris des distances. Mais sur bien d'autres questions, François Fillon a toujours été le tenant d'une ligne plus dure, prônant par exemple "l'assimilation" des immigrés et souhaitant restreindre l'accès aux prestations sociales pour les étrangers.
Ligne droitière. En apportant son soutien à François Fillon, Sens Commun rappelle donc que François Fillon n'est pas le centriste que ses opposants ont parfois voulu décrire, et qu'il a pris quelques distances avec le "gaullisme social" dont il se réclame. Le député de Paris prône un contrôle accru de l'immigration, avec notamment la mise en place de "quotas", veut toujours réduire l'accès aux prestations sociales pour les étrangers, mais aussi supprimer l'aide médicale d'urgence (AME). Sa ligne droitière se poursuit sur les questions de famille avec, outre l'abrogation de la loi Taubira, la volonté d'abolir la gestation pour autrui au niveau international.
Enfin, l'ancien Premier ministre se vante de proposer le programme économique le plus libéral de tous : suppression des 35 heures et de 600.000 postes de fonctionnaires, recul de l'âge de la retraite, dégressivité de l'assurance-chômage et 110 milliards d'euros d'économie en cinq ans. Tout, en somme, pour plaire à l'aile droite des Républicains. Et à Christophe Billan, président de Sens Commun, qui voit là "un projet particulièrement élaboré" capable de développer "une économie prospère, raisonnable, au service de l'homme", ainsi qu'il l'a expliqué à Valeurs Actuelles.