Sept heures puis six heures avec des maires, cinq heures avec des jeunes, trois heures avec des citoyens… Depuis la mi-janvier, Emmanuel Macron n’a pas ménagé son temps pour lancer sur de bons rails le "grand débat national", censé mettre fin à la crise des "gilets jaunes". De quoi s’attirer les foudres de l’opposition, qui crie au "meeting électoral" à chacune de ces interventions, largement diffusées, alors qu’approche la date du 26 mai, celle des élections européennes, d'autant qu'en parallèle, la cote de popularité du chef de l'Etat repart à la hausse. Du Rassemblement national à La France insoumise, en passant par le Parti socialiste ou Les Républicains, beaucoup en appellent au CSA pour prendre en compte le temps de parole présidentielle dans la future campagne à venir. Mais c’est en réalité plus compliqué que cela.
Les européennes sont encore trop loin
Une chose est sûre : le temps de parole d’Emmanuel Macron, lors que ses échanges avec des élus ou des citoyens sont diffusés sur une antenne, ne peut pas être décompté comme un temps de parole pour la campagne des européennes. D’abord parce que l’échéance est trop lointaine. C’est en effet six semaines avant un scrutin que le CSA commence à scruter les temps d’antenne de chaque camp, selon un principe d’équité. Cette notion se fonde principalement sur la représentativité des candidats, en fonction du résultat des dernières élections.
Il peut toutefois y avoir des exceptions. Le 1er décembre 2011, Nicolas Sarkozy, alors président de la République mais pas encore candidat à sa succession, avait tenu une réunion publique à Toulon. Mais les conditions de son organisation, et notamment l’implication de l’UMP de l’époque, avait poussé à requalifier l’événement en meeting électoral, mais a posteriori seulement.
En l’occurrence, il semble qu’Emmanuel Macron prenne les précautions nécessaires pour éviter un tel déboire. "Tant que dans les éléments de langage, il n'y a pas de référence aux élections européennes à venir, pas de critique des listes adverses, pas d'élément de langage qui incite directement les électeurs à aller voter pour En Marche aux élections européennes", le chef de l’Etat est dans les clous, explique auprès de BFMTV Romain Rambaud, professeur de droit public à l'université Grenoble Alpes.
Une question de pluralisme
Cela dit, même hors période électorale, les médias sont contraints de respecter le pluralisme politique. "Le pouvoir exécutif se voit réserver un accès à l’antenne correspondant au tiers du temps total d’intervention", explique le CSA sur son site internet. Sont décomptées les interventions du président de la République, de ses collaborateurs et des membres du gouvernement.
Les chaînes d’info continue qui diffusent en intégralité les échanges d’Emmanuel Macron devront donc faire de la place aux autres acteurs politiques, à savoir "les partis et mouvements politiques qui expriment les grandes orientations de la vie politique nationale", comme l’indique le CSA. Les critères retenus par l’instance de contrôle sont "les résultats des consultations électorales, le nombre et les catégories d’élus, l’importance des groupes parlementaires ou les indications de sondages d’opinion".
On l’aura compris : les deux tiers de temps de parole restants doivent donc être répartis entre les partis d’opposition d’un côté, mais aussi entre ceux de la majorité de l’autre. Malgré la très grande présence médiatique actuelle d’Emmanuel Macron, La République en marche et ses leaders disposent donc encore d’une certaine marge.