Mais que va-t-il donc faire là-bas ? Alors que la plupart des candidats à la présidentielle préfèrent, pour leur premier déplacement à l'étranger, privilégier les partenaires européens historiques comme l'Allemagne, Benoît Hamon, lui, a choisi de se rendre au Portugal. Entre vendredi après-midi et samedi, le vainqueur de la primaire de la gauche aura le temps de passer par le lycée français de Lisbonne, de rencontrer des syndicats portugais, mais aussi de déjeuner avec le premier ministre portugais, Antonio Costa.
"Cela n'a rien d'anodin". Un choix dans le prolongement d'une campagne qui prend le contrepied des passages obligés traditionnels. Benoît Hamon se tient loin des 20h télévisés et des sujets brûlants, préférant visiter des fermes bio et discuter avec des travailleurs de nuit. Mais c'est aussi un déplacement qui "n'a rien d'anodin", avertit Jérôme Guedj, porte-parole du candidat. Qui rappelle l'essentiel : "le Portugal est gouverné par une coalition de gauche."
Coalition de gauche. Arrivé au pouvoir en 2015, le socialiste Antonio Costa a réussi à former une alliance inédite avec la gauche radicale au Parlement portugais. Et ce, en dépit du scepticisme du président, Anibal Cavaco Silva, conservateur, qui voyait là un attelage contre-nature entre socialistes pro-européens et communistes eurosceptiques. Bon gré, mal gré, l'alliance a tenu. Et des changements radicaux ont été entrepris pour l'économie d'un pays soumis, depuis 2011, à des mesures austéritaires drastiques. Retour des 35 heures (contre 40) pour les fonctionnaires, augmentation du salaire minimum, baisse de la TVA sur la restauration, rétablissement des jours fériés : Antonio Costa a pris le contrepied de ses prédécesseurs de droite. Et pour l'instant, l'alliance résiste aux tensions internes.
Convergences avec le Portugal. Un bien bel exemple pour Benoît Hamon, qui veut montrer qu'une "autre Europe", et que des "convergences" avec des membres de l'UE dirigés par des partis de gauche, sont "possibles", explique Jérôme Guedj. Le socialiste français prône lui aussi des changements radicaux en matière socio-économique, avec notamment une réflexion sur le temps de travail. Surtout, il n'a pas fait mystère de son envie de rassemblement à gauche, comme un miroir à la coalition portugaise. Le soir de sa victoire à la primaire, le 29 janvier, il avait immédiatement appelé l'écologiste Yannick Jadot et le leader de la France Insoumise Jean-Luc Mélenchon à "construire une majorité gouvernementale cohérente".
Appel du pied. Mais depuis, les discussions s'enlisent. Avec Jean-Luc Mélenchon, elles semblent impossibles. En meeting à Strasbourg mercredi, le cofondateur du Parti de gauche s'est montré bravache, proposant "un rendez-vous la semaine prochaine" à Benoît Hamon et Yannick Jadot, fixant les jours. "C'est moi qui propose", a-t-il lancé, avant de préciser que si candidature unique il y avait, ce serait la sienne évidemment. Avec les Verts, les discussions sont en cours, elles ont d'ailleurs été approuvées par les sympathisants écologistes via un vote jeudi. Mais pour l'instant, rien de concret. Dans ce contexte compliqué, la visite de Benoît Hamon au Portugal a tout d'un symbole, et même d'un appel du pied à Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon. Pour leur montrer que oui, un accord est possible.