Cumul des mandats, référendum, procédure législative : à sept mois de la présidentielle, François Hollande a plaidé jeudi pour une démocratie "revisitée", lors d'un colloque organisé devant les parlementaires. Point de VIe République ou de big bang institutionnel, mais une série de propositions dans la droite ligne de son quinquennat, qu'il pourrait lui-même porter s'il se présentait à nouveau.
"Revoir entièrement la procédure législative". Convaincu que la "fabrique de la loi" est un "enjeu majeur", le chef de l'Etat a lancé : "Je propose donc que nous puissions entièrement revoir la procédure législative". Concrètement, il s'agirait d'une nouvelle "procédure express" accordant 70 jours au Parlement pour examiner un projet de loi, et une seule lecture par chambre pour les textes en urgence. François Hollande reste marqué en particulier par l'expérience de la loi sur le mariage pour tous, si longuement débattue qu'elle avait permis à l'opposition de faire feu de tout bois contre le gouvernement et lui-même. Il s'agit, a-t-il aussi souligné, de combler le "décalage de plus en plus flagrant entre le temps exigé par le mode d'élaboration de la loi et la rapidité attendue par les citoyens".
Abaisser le seuil du référendum d'initiative populaire. Seconde proposition phare : abaisser le seuil de signatures nécessaires à l'organisation d'un référendum d'initiative populaire, et mieux "reconnaître" le "droit de pétition". Sur le premier point, a reconnu François Hollande, la procédure prévue par la réforme constitutionnelle de 2008 est aujourd'hui de fait "verrouillée". "Aujourd'hui il faut 4,5 millions de citoyens, et avec une initiative qui appartient aux parlementaires", a-t-il ainsi observé. Sans préciser quel serait le seuil souhaitable, il a toutefois souligné qu'il faudrait "garder des systèmes de contrôle" car "on voit bien l'abus qui pourrait en être fait". François Hollande s'est ainsi clairement démarqué des candidats à la présidentielle, du FN à Arnaud Montebourg, qui plaident pour un référendum d'initiative populaire beaucoup plus ouvert, comme en Suisse ou en Italie.
"Nous devons reconnaître" le droit de pétition. Quant au droit de pétition "que nous devons reconnaître", il pourrait se traduire selon lui par l'obligation pour le Parlement "d'organiser un débat dès lors que 500.000 signatures auraient été recueillies sur une proposition". François Hollande en revanche, n'est pas enthousiaste à l'idée d'un recours massif aux ordonnances, prôné par plusieurs candidats à la primaire de la droite. "Ils se disent qu'en contournant le Parlement pour mettre en cause le modèle social, ils pourraient contourner le peuple, mais ils vont le retrouver dans la rue", a-t-il averti.
Limiter le cumul "dans le temps". À rebours de certains prétendants à la présidentielle à droite souhaitant revenir sur le non-cumul des mandats, François Hollande a au contraire affirmé sa volonté d'aller "plus loin" en limitant le "cumul dans le temps", idée ancienne mais jamais suivie d'effet. Ce serait, a-t-il argumenté, un moyen d'"accroître la représentativité de nos assemblées". Il a ironisé sur "l'imagination" institutionnelle de certains à quelques mois de la présidentielle. "Les propositions, c'est vrai, abondent en ce moment. Ce doit être la période", s'est-il amusé, évoquant ceux qui "invoquent une VIe République avec la suppression du poste de Premier ministre, ou au contraire la diminution des prérogatives du président de la République".
Éloges à la Ve République. Bien au contraire, il n'a pas tari d'éloges sur la Ve République, se coulant dans ses habits gaulliens. "Ces institutions m'ont permis de faire des choix dans des moments extrêmement importants de la vie de notre pays", a-t-il argué, vantant des institutions qui lui ont permis "d'agir vite" pour engager les troupes françaises au Mali ou en Centrafrique, et répliquer aux attaques djihadistes qui ont ensanglanté la France.
Il ne s'est pas privé non plus d'un petit tacle à l'égard de la Cour des comptes dont il a pourtant été membre : "Elle fait un travail admirable pour certifier les comptes publics" mais, a-t-il déploré, "elle est devenue une instance d'évaluation alors que c'est au Parlement que cette évaluation doit être faite". Globalement, le président du Sénat Gérard Larcher a vu surtout "un exercice d'autosatisfaction" dans ces propositions : "Fallait-il attendre cinq ans pour s'apercevoir que la fabrique de la loi était trop longue et trop complexe?"