Pour sa première interview en tant que secrétaire d'État auprès du ministre de l'Intérieur, Laurent Nuñez s'est opposé à la vision de son prédécesseur Gérard Collomb sur l'immigration et l'insécurité.
Jusque-là patron de la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI), Laurent Nuñez a été nommé secrétaire d'État auprès du nouveau ministre de l'Intérieur Christophe Castaner. S'il succède à Gérard Collomb, il n'adhère pas pour autant aux récents propos tenus par le maire de Lyon. C'est ce qu'il a expliqué au micro d'Audrey Crespo-Mara, vendredi matin sur Europe 1.
Quand Gérard Collomb vise l'immigration. Le magazine Valeurs actuelles, dans son édition de jeudi, révèle un dialogue en "off" (hors interview), datant du 13 février dernier, entre le locataire de la place Beauvau et un journaliste. Gérard Collomb y déclare notamment : "Ce que je lis tous les matins dans les notes de police reflète une situation très pessimiste. Les rapports entre les gens sont très durs, les gens ne veulent pas vivre ensemble." Dans cet échange, l'ex-ministre, qui a fait voter la loi controversée asile-immigration, considère que la responsabilité de l'immigration est "énorme".
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Laurent Nuñez s'inscrit en faux. "Ces propos ont été tenus dans un contexte un peu informel, il est donc difficile pour moi de les commenter. Mais je ne partage pas ce sentiment", a estimé Laurent Nuñez sur notre antenne, avant de défendre la position de la majorité. "Le gouvernement mène une politique d'immigration qui est maîtrisée, équilibrée. Il y a beaucoup de fermeté avec l'immigration irrégulière, les reconduites (à la frontière) ont augmenté de 20% cette année. Et en même temps, il mène une politique d'intégration à laquelle sont consacrés des moyens budgétaires importants, pour arriver justement à cette immigration équilibrée. Je ne vois pas en quoi cela pourrait déstabiliser notre société", rétorque l'ancien dirigeant de la DGSI.
Dans les quartiers, une "minorité" de perturbateurs. En quittant son poste au ministère, Gérard Collomb avait aussi affirmé qu'aujourd'hui, dans les quartiers, "la loi du plus fort s'imposait", "celle des narcotrafiquants et des islamistes radicaux qui a pris la place de la République". "Il a même dit que si l'on n'y prenait pas garde, les gens vivraient face à face et non plus côte à côte", ajoute Laurent Nuñez. Là encore, le nouveau secrétaire d'Etat marque son désaccord. "Je n'ai pas du tout ce sentiment. J'ai beaucoup travaillé en Seine-Saint-Denis, à Paris, à Marseille… Je vois dans ces quartiers une force et une énergie républicaine énorme, polluée par une minorité de trafiquants de stups, d'auteurs de violences, et de pratiques communautaires", nuance-t-il. "Et c'est bien pour cela que le gouvernement développe dans ces quartiers une politique de reconquête républicaine, avec une police de sécurité du quotidien, qui travaille avec tous les acteurs."
Avec Christophe Castaner, "nous sommes une équipe". S'il se désolidarise de son prédécesseur, Laurent Nuñez fait cependant corps avec son binôme à l'Intérieur, Christophe Castaner. Leur nomination conjointe a donné l'image d'un duo mi-politique (puisque Christophe Castaner est un proche d'Emmanuel Macron) mi-technique (avec celle de Laurent Nuñez, pour compenser l'inexpérience du premier dans ce domaine). Mais sur notre antenne, l'intéressé jure que les choses "ne se sont pas du tout passées comme ça." "Cette image est peu erronée. Nous travaillons ensemble sur tous les dossiers", certifie le spécialiste de l'antiterrorisme. "Moi, j'ai un parcours de haut fonctionnaire qui a duré une dizaine d'années où j'ai exercé des postes, c'est vrai, au plus près des forces de l'ordre. Lui a une expérience d'élu et il connaît très bien les questions de sécurité. Nous sommes une équipe avec Christophe Castaner."