Le Premier ministre Edouard Philippe avait annoncé une réforme "d’ici la fin du quinquennat", ce sera finalement un peu plus tôt. Les premiers effets de la réforme de la taxe d'habitation, dont le président veut exonérer 80% des ménages, se feront en effet sentir dès 2018. Idem pour la réforme de l’Impôt sur la fortune (qui ne concernera bientôt plus que les biens immobiliers), que le chef du gouvernement avait pourtant annoncée pour 2019.
"Le président de la République a décidé de mettre en application cette partie de son programme dès 2018", a confié à l'AFP une source proche du ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, confirmant des informations de Franceinfo. Un peu plus tard, Matignon a également confirmé à l'AFP que le gouvernement cherchait à créer "un choc d'offre et de confiance".
Un compromis obtenu pendant le week-end. L’objectif de rester sous les 3% de déficit public en 2017 et en 2018 n’est pas abandonné. Mais l’Elysée tenait à la mise en place rapide des promesses de campagne d’Emmanuel Macron. Pour faire face aux réticences d’Edouard Philippe et Bruno Le Maire, le chef de l’Etat a opté pour un compromis, ce week-end, après des heures de tractations avec les deux ministres.
La taxe d’habitations sera donc bien supprimée à partir de 2018, mais progressivement. Cela commencera pour les ménages les plus modestes, pour arriver à 80% des foyers d’ici 2022, comme annoncé par Edouard Philippe lors de son discours de politique générale. "Dire que (...) c'était d'ici la fin du quinquennat, c'était volontairement flou", du fait "qu'on n'a pas encore rendu tous les arbitrages", reconnaît-on du côté de Matignon. Pour rappel, le programme du candidat d’En marche ! évoquait 2020 pour la suppression de la taxe d’habitation pour "quatre Français sur cinq"...
Quant à la réforme de l’ISF, qui vise à exclure de cet impôt les valeurs mobilières (y compris l'assurance-vie), elle sera lancée dès 2018. Les arguments du président, selon lequel cette mesure est bonne pour la croissance, semblent avoir convaincu.
" Emmanuel Macron ne voulait pas que le discours sur les économies budgétaires vienne brouiller le message économique "
Baisse des impôts et des dépenses, la difficile équation. Le discours de politique générale d’Edouard Philippe avait été marqué par une grande prudence quant aux annonces sur la baisse de la fiscalité, quelques jours après la publication d'un audit alarmiste de la Cour des comptes sur l'état du déficit. Selon les sages de la rue Cambon, le déficit public devrait déraper à 3,2% du produit intérieur brut en 2017, dépassant la barre des 3% exigée par les traités européens. Dans son discours, Edouard Philippe avait donc mis l'accent sur la lutte contre l'"addiction française à la dépense publique" et reporté plusieurs baisses d'impôts initialement prévues dès 2018, notamment l'ISF et la taxe d'habitation.
Depuis, le gouvernement semble vouloir corriger le tir, gardant sa ligne sur la réduction de la dépense publique mais multipliant les déclarations rassurantes sur les baisses d'impôts. Emmanuel Macron, qui tenait au "choc de confiance", "ne voulait pas que le discours sur les économies budgétaires vienne brouiller le message économique" initiale (sur les baisses d'impôts), a expliqué à l'AFP une source gouvernementale. Au cours du week-end, Edouard Philippe a donc assuré que les prélèvements obligatoires baisseraient de 7 milliards d'euros l'an prochain, tandis que Bruno Le Maire a estimé possible de réduire simultanément les dépenses publiques et les impôts. "Les 7 milliards, ce n'est pas une surprise, c'est en grande partie du reliquat des annonces de Hollande", explique-t-on à Matignon. "Si on les annulait, certains auraient pu dire qu'on augmentait les impôts."
Les collectivités inquiètes. Reste que ces baisses d'impôts ne font pas que des heureux, en premier lieu du côté des collectivités locales, qui se trouveraient privées d'une précieuse ressource (environ 10 milliards d’euros) avec la réduction à la portion congrue de la taxe d'habitation. L'exécutif a pris soin d'assurer que l'Etat compenserait leur manque à gagner. Le sujet doit être abordé à la mi-juillet lors de la Conférence nationale des territoires, qui se tiendra au Sénat.