La ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal a indiqué dans un entretien au JDDsouhaiter "qu'on relève le débat" alors qu'elle se trouve empêtrée dans une polémique après avoir demandé une enquête sur "l'islamo-gauchisme" à l'université. "Nous avons besoin d'un état des lieux sur ce qui se fait en recherche en France sur ces sujets", a-t-elle indiqué, assurant vouloir une enquête "au sens sociologique du terme".
>> ANALYSE - "Islamo-gauchisme" : l'enquête demandée par Vidal gêne-t-elle la "liberté académique" ?
La ministre s'est retrouvée prise dans une polémique après avoir dénoncé le 14 février "l'islamo-gauchisme" qui, selon elle, "gangrène la société dans son ensemble et l'université n'est pas imperméable", avant de demander mardi au CNRS "un bilan de l'ensemble des recherches" qui se déroulent en France, afin de distinguer ce qui relève de la recherche académique et ce qui relève du militantisme. Ces déclarations ont suscité de vives réactions dans le monde académique, au point que 600 universitaires (enseignants, chercheurs...) ont réclamé samedi, dans une tribune publiée par le journal Le Monde, sa démission en lui reprochant de "faire planer la menace d'une répression intellectuelle".
Elle dénonce un "procès d'intention"
Récusant vouloir mettre en place une "police de la pensée", Frédérique Vidal y voit un "procès d'intention", assurant au contraire vouloir "déconstruire l'idée qu'il y aurait une pensée unique sur certains sujets et (...) protéger le pluralisme des idées à l'université". "Je suis universitaire. J'ai toujours défendu la liberté académique et les chercheurs", assure-t-elle.
"Si les universitaires qui ne me connaissent pas ont pu se sentir froissés, ce n’était pas mon intention. Chacun doit pouvoir s’exprimer, c’est aussi dans le désaccord qu’on avance", a souligné la ministre.
"Je veux une approche rationnelle et scientifique"
Le CNRS avait accepté mardi de participer à l'étude demandée par la ministre sur "l'islamo-gauchisme", regrettant cependant "une polémique emblématique d'une instrumentalisation de la science" et un "slogan politique [qui] ne correspondait à aucune réalité scientifique". "Je veux une approche rationnelle et scientifique du sujet. Il faut quantifier les choses, sortir du ressenti et du présupposé", avance-t-elle. "Les libertés académiques, la liberté de la recherche doivent être défendues à tout prix. Ce que je souhaite, c'est savoir si ces libertés ne sont pas entravées dans le travail des chercheurs et des enseignants-chercheurs", indique la ministre.
Frédérique Vidal relève que "ce sujet suscite beaucoup de réactions, mais ce n’est pas notre priorité aujourd’hui". "La priorité, c'est la situation des étudiants et la pandémie".