Jacques Toubon : "Inscrire la déchéance de nationalité dans la Constitution est inquiétant"

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J.D , modifié à
Le défenseur des droits était l'invité d'Europe 1 dimanche soir. 
INTERVIEW

Jacques Toubon est depuis longtemps contre l'extension de la déchéance de nationalité et avait appelé l'Etat à y renoncer. Invité sur Europe 1 dimanche soir, le défenseur des droits estime que l'entêtement du gouvernement sur le sujet est "une erreur". : 

Une mesure symbolique inquiétante. "C'est une erreur. Et elle est d'autant plus lourde que, comme ceux qui la propose l'ont dit, c'est un symbole", critique Jacques Toubon  Le défenseur des droits estime qu'inscrire ce symbole dans la Constitution est "inquiétant" : "Inscrire dans la Constitution la déchéance de nationalité, l'appliquer à des personnes nées françaises et non pas des personnes qui ont acquis la nationalité, c'est au niveau symbolique quelque chose de déterminant et de mon point de vue inquiétant". 

Pire cela va, selon lui, à l'encontre du texte même de la Constitution :"La Constitution dans son article 1 dit que la République est indivisible. La Constitution dit que tous les citoyens sont égaux, et d'ailleurs la Constitution ne parle qu'à deux reprises de la nationalité", explique Jacques Toubon, soulignant que "monter la nationalité dans la Constitution et dire cette nationalité peut-être à géométrie variable, c'est une mesure extrêmement lourde". "Il y aurait alors deux, et peut-être demain trois ou quatre, sortes de citoyenneté. Une citoyenneté incontestable et une citoyenneté qui peut être contestée, quelque soit la légitimité de la contestation", prévient-il. Avant d'ajouter que c'est exactement ce que  les terroristes souhaitent : "Ils souhaitent que nous mettions en cause nos libertés et nos principes pour les attaquer".

L'état d'urgence peut mener à un "Etat de droit de qualité inférieur". Sur l'introduction de l'état d'urgence dans la Constitution, Jacques Toubon met plus largement en garde contre la création d'une situation permanente qui nous priverait de nos libertés : "La question c'est, est-ce que on va, compte tenu de la nécessité d'assurer la sécurité, mettre en place une sorte 'd'état d'exception permanent' dans lequel les libertés fondamentales seraient restreintes durablement ?", s’inquiète le défenseur des droits."A ce moment là, nous aurions un Etat de droit inférieur". Il précise que ces mesures mettant en danger l'Etat de droit ne sont pas encore dans la réforme constitutionnelle du gouvernement, mais pourraient venir dans les textes qui suivront.