La crise du lait frappe le monde agricole où les éleveurs sont confrontés à une chute des cours liée à la surproduction. Une rencontre est prévue à Paris jeudi entre ces derniers et le géant Lactalis, un sujet très sensible et que l’Elysée suit comme le lait sur le feu.
Bonnets rouges. La crise du Grand-Ouest rural et agricole de 2013 est le grand mouvement social qui a fait reculer le président de la République sur l’écotaxe. Les jeunes et les agriculteurs sont les deux catégories dont François Hollande redoute les accès de fièvre et les colères. Or, le secteur agricole tout entier est en crise permanente. Les éleveurs l’an dernier et cet hiver, et auxquels il a finalement fallu lâcher 500 millions d’euros, cet été ce sont les producteurs de fruits et légumes qui ont souffert et, après la crise du lait, c’est celle des céréaliers - dont les niveaux de rendements sont historiquement bas à cause des conditions climatiques défavorables -, que redoute le gouvernement. Stéphane Le Foll, le ministre de l’Agriculture, est donc prié par l’Elysée de jouer les pompiers pour éteindre le moindre début d’incendie.
Le risque d'une flambée sociale. Mais la crise est structurelle. Ce sont tous nos modes de productions qu’il faut revoir, les problématiques de l’agriculture intensive ne se régleront pas en quelques mois. C’est pour cette raison que le gouvernement mettra la main au portefeuille, d’une manière ou d’une autre : exonération de charges, aides ponctuelles, gestes fiscaux, etc. Si le puissant secteur des céréaliers embraye sur les laitiers, le gouvernement paiera parce que le président redoute une flambée sociale, les mouvements d’agriculteurs étant souvent marqués par des actions musclées de blocage qui mettent à l’épreuve l’autorité du gouvernement.
Une image de la France éternelle. Et puis, derrière le monde agricole qui souffre économiquement, c’est aussi la France rurale qui gronde. Le million d’agriculteurs qui résiste dans nos campagnes bénéficie d’une caisse de résonance considérable dans le pays ; utiles, courageux, sympathiques, incarnant la valeur travail et l’engagement, c’est ainsi qu’ils sont perçus dans les études d’opinion. Les Français, par exemple, se disent prêts à payer un peu plus chers leurs aliments si c’est cela bénéficie aux producteurs.
Un président discrédité. Or François Hollande a épuisé son crédit auprès des agriculteurs. Si en 2012 il établit le record du temps passé au salon de l’agriculture, en 2016 il s’est fait huer lors de son passage, sa visite s’est soldée par deux blessés et cinq arrestations. À huit mois de la présidentielle, le risque d’embrasement du monde rural reste une menace politique à haut risque pour le président.