Chaque semaine, Europe1.fr vous propose un regard décalé sur la campagne présidentielle, dans l'objectif d'un photographe de l'AFP.
C’était le premier rendez-vous à l’agenda du président élu. Emmanuel Macron était invité par François Hollande à assister avec lui à la cérémonie du 8-Mai sur les Champs-Élysées, au lendemain du second tour de la présidentielle, qui a consacré sa victoire face à Marine Le Pen. Le photographe de l’AFP Stéphane De Sakutin, en charge de la couverture de l’Élysée, était présent lorsque les deux hommes se sont retrouvés officiellement pour la première fois depuis longtemps.
- Choisir le moment
François Hollande a invité Emmanuel Macron à la cérémonie du 8-Mai. C’était le gros intérêt de cet événement puisqu’il s’agissait de la première apparition publique du président élu, au lendemain du second tour de la présidentielle. Je suis arrivé deux heures avant. J’étais en "pool mobile" (il suivait François Hollande pendant toute la cérémonie, pour le compte de plusieurs médias, ndlr), il y avait très peu de journalistes accrédités.
François Hollande est arrivé, il a d’abord été accueilli par le Premier ministre et le ministre de la Défense, il a passé les troupes en revue et rendu l’hommage au drapeau. C’est uniquement après cela qu’il va chercher Emmanuel Macron, qui attendait alors en tribune officielle.
Je savais que François Hollande allait se diriger vers Emmanuel Macron donc j’ai un peu couru, quitté l’hommage au drapeau rapidement, afin de me positionner et trouver le bon angle. C’était LE moment à saisir : les avoir tous les deux, en face-à-face, capter une complicité et des regards.
- Décrire une ambiance
François Hollande a foncé directement vers Emmanuel Macron, sans dire bonjour à Claude Bartolone, Nicolas Sarkozy ou Gérard Larcher. Mais c’est le protocole. Il est venu saluer et chercher son successeur pour poursuivre la cérémonie. Quand François Hollande arrive à sa hauteur, il y a eu comme un flottement : j’ai cru que les deux hommes allaient se faire la bise, se donner l’accolade, mais j’ai ressenti une certaine retenue.
Les "deux présidents" se rencontraient publiquement et officiellement pour la première fois depuis longtemps. Il y a alors une vraie complicité entre eux, et toutes les autres personnes présentes dans la tribune semblent bien se dire que quelque chose se passe à ce moment-là. Il y avait beaucoup de dignité et de solennité.
" C’était LE moment à saisir : les avoir tous les deux, en face-à-face, capter une complicité et des regards. "
- Réfléchir au cadrage
Le cadrage n’était pas intentionnel : une marche séparait François Hollande de la tribune et il n’avait pas les moyens de monter. Le président sortant est sur le sol, à ma hauteur, et les autres sont surélevés sur la tribune. On a l’impression que François Hollande s’incline face au président élu mais ce n’est pas le cas. On peut bien sûr interpréter politiquement cette posture : Emmanuel Macron est le nouveau président, il a une position plus avantageuse que François Hollande.
- Donner du sens à une image
Il y a beaucoup de choses dans le regard des "deux présidents" : Emmanuel Macron est le dauphin de François Hollande et en même temps, ce dernier est amer car il aurait pu se représenter dans d’autres conditions. Il y a comme un petit pincement chez François Hollande, mais aussi un soulagement que ce soit Macron le nouveau président, et dans ces conditions-là, avec ce score-là.
Quant à Emmanuel Macron, je dirais qu’il a l’air d’être content et fier. Il jouait le jeu, il devait sentir le poids de cette nouvelle charge qui pèse sur lui. Lors de la cérémonie, les deux hommes se sont montrés très proches. François Hollande était paternaliste, Emmanuel Macron était tout le temps sous son regard.
J’aime bien cette photo car c’est vraiment le moment où les deux hommes se revoient. J’aime aussi le fait que Bartolone, Larcher et Sarkozy soient sur la photo, le regard de Nicolas Sarkozy, le panneau de l’avenue des Champs-Élysées dans l’angle… Ce n’est pas ma préférée de cette cérémonie mais c’est "l’instant T" où Hollande va chercher Macron.