Chaque semaine, Europe1.fr vous propose un regard décalé sur la campagne présidentielle, dans l'objectif d'un photographe de l'AFP.
On dit de lui qu’il pourrait priver François Fillon d’une qualification au second tour de l’élection présidentielle. Sans être un poids lourd de cette campagne, Nicolas Dupont-Aignan est crédité depuis plusieurs mois d’environ 3% d’intentions de vote et continue d’écumer la France, comme ses dix concurrents, pour grappiller de précieux points au soir du 23 avril. Mardi, il a organisé une visite dans plusieurs commerces du centre de Paris pour rencontrer des patrons et évoquer avec eux la question du RSI. Philippe Lopez, photographe à l’AFP et auteur du cliché ci-dessus, a posé son objectif dans un bar du 7ème arrondissement de la capitale et raconte ce moment.
- Choisir le lieu
C’était un déplacement organisé par le service de presse et il était environ 16 heures quand Nicolas Dupont-Aignan a pénétré dans ce café de la rue de Sèvres. Il était déjà rentré une première fois, mais l’absence du patron l’a fait ressortir pour discuter avec des clients en terrasse. Le bar était construit en couloir, pas très grand, d’ailleurs la photo montre que tout le monde est à l’étroit.
Nous, les photographes, y étions déjà depuis quelques secondes, le temps de prendre position et capturer au mieux son entrée dans le bar. Il fallait faire vite car il était suivi par des journalistes et des caméramans. Quelques secondes plus tard, la photo n’aurait sûrement rien donné. Avec deux collègues, on a donc demandé au patron si on pouvait se placer derrière le comptoir pour prendre des photos, ce qu’il a accepté. C’est d’ailleurs pour cette raison que les deux clients du bar, à gauche, regardent devant eux et pas derrière : ce n’est pas le barman qui s’y trouve mais des photographes.
- Décrire une ambiance
Quand il est arrivé, il y avait cinq, six clients et certains sont partis, préférant quitter l’agitation du bar qui était plutôt calme avant l’entrée de Nicolas Dupont-Aignan. Plusieurs clients, qui s'interrogeaient sur son identité. Certains ne le connaissaient pas du tout. Sa présence a changé la physionomie du lieu.
Ensuite, ça va très vite : Nicolas Dupont-Aignan est entré et a dit bonjour aux clients du bar en quelques secondes, le portable à la main gauche. Spontanément, il s’est dirigé vers l’homme à droite de la photo, qui tenait une tasse dans la main. Juste après cette photo, surpris, le client a reposé sa tasse et serré la main du candidat, qui s’est ensuite dirigé vers le fond du café pour parler avec des journalistes.
- Réfléchir au cadrage
Il a avait beaucoup de contraintes dans cette photo, prise derrière le comptoir. Il s’agit déjà d’un faux-jour et de manière générale, les photos d’intérieur sont plus compliquées que dehors. Ensuite, je n’aurais pas pu prendre la photo si j’avais été à la place du caméraman au centre de l’image, en raison de la place. J’ai aussi dû éviter de mettre le flash, sinon les personnages au premier plan auraient été surexposés. Ce qui explique que la photo est un peu sombre. Pourtant, l’image serait moins lisible si elle était plus lumineuse.
J’ai eu, en revanche, un coup de chance : la tasse de café est un point d’ancrage dans la photo. On part de la tasse, on va vers le visage du client, et puis on regarde Nicolas Dupont-Aignan. Elle a l’avantage d’être un point clair, comme l’est le flash du caméraman, à gauche de Nicolas Dupont-Aignan. Mieux : le pot rouge et le blouson de la même couleur posent le premier plan. Le candidat est cadré de toutes parts. C’est un moment authentique.
- Donner du sens à une image
C’est ma première campagne présidentielle. Les visites comme celles-ci, ce sont des figures un peu imposées. On ne réinvente rien, on fait des images provoquées au début : le candidat qui parle en banlieue, en salon, dans les commerces. Pour tout le monde, ce sont des déplacements qui sont réalisés pour amener de l’image et tout est déjà un peu écrit. Tous les photographes essaient donc de récupérer des moments différents dans ce contexte contrôlé. De saisir du décalé dans le cadre.