C'est après des discussions houleuses que l'Assemblée a rejeté, vendredi, la taxe "YouTube" que certains députés socialistes souhaitaient inscrire dans le projet de budget 2017. Cette mesure, qui devait permettre de taxer à hauteur de 2% les revenus publicitaires des sites mettant à disposition des vidéos gratuites ou payantes sur Internet, était notamment défendue par l'élue PS Karine Berger. Cette dernière estimait qu'il s'agissait d'un dispositif de "justice fiscale", qui permettrait de "mettre enfin un pied dans la porte de la taxation des Gafa" [un acronyme désignant les géants du web que sont Google, Amazon, Facebook et Apple].
Les Gafa pointés du doigt. La députée des Hautes-Alpes a estimé que sans cette taxation, "les concurrents européens ne survivront pas face aux géants américains". Google, Apple, Facebook et Amazon sont en effet régulièrement accusées de vouloir échapper à l'impôt en faisant voyager leurs revenus d'un pays à l'autre, via des montages complexes, au gré des taux d'imposition.
Avis défavorable du gouvernement. Le gouvernement, en revanche, était défavorable à cette mesure. Le secrétaire d'Etat au Budget, Christian Eckert, a ainsi dit craindre que "ce ne soit plutôt une taxe Dailymotion", jugeant "extrêmement difficile d'aller la recouvrer auprès d'un opérateur qui n'est pas sur notre territoire, alors que ce serait plus facile auprès d'opérateurs installés chez nous". Et cette taxe ne serait qu'"une mini-piqûre de moustiques pour les géants dont nous parlons", a-t-il lancé.
La balle renvoyée à l'Europe. Quant à l'imposition des Gafa, cette question "lourde, fondamentale" doit se traiter "au niveau a minima européen", a estimé le secrétaire d'Etat. La France a cependant déjà engagé plusieurs redressements fiscaux et une perquisition a été menée chez Google, mais les éventuelles rentrées fiscales risquent d'être retardées par "des contentieux".
Fracture à gauche. Le débat sur cette taxe a montré une nouvelle fois une fracture au sein de la gauche et des socialistes. Chef de file PS pour le projet de budget, Dominique Lefebvre a notamment affiché des craintes d'"effets pervers", glissant que "mettre un pied dans la porte c'est bien, se prendre les doigts dans la porte moins bien". "Arrêtons de donner une image catastrophique de la France sur le numérique", s'est exclamé Luc Belot, arguant que la création de taxes à l'échelle d'un pays n'a jamais abouti à l'effet recherché, avec l'exemple d'Amazon.