Gérard Larcher 1280 2:58
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Invité d'Europe 1, Gérard Larcher a posé ses garde-fous face à la réforme constitutionnelle voulue par Emmanuel Macron.
INTERVIEW

La réforme des institutions voulue par Emmanuel Macron va-t-elle tourner au bras de fer avec la droite parlementaire ? "En aucun cas le Parlement ne peut sortir affaibli de la révision constitutionnelle", a martelé dimanche Gérard Larcher, le président LR du Sénat, au micro du Grand Rendez-Vous d’Europe 1/ Cnews/ Les Echos. "Un exécutif fort ne doit pas avoir peur d’un Parlement fort", a-t-il prévenu. Alors que les consultations organisées par Edouard Philippe, le Premier ministre, se sont achevées cette semaine, Gérard Larcher assure toutefois que le gouvernement et les parlementaires "vont au dialogue sur un certain nombre de points". Pour autant, le deuxième personnage de l’Etat n’a pas manqué d’adresser à l’exécutif un certain nombre d’avertissements.

Une dose de proportionnelle, "plutôt à 10 %"

Parmi les pistes évoquées par le gouvernement figure l’introduction d’une dose de proportionnelle dans le système électoral. "Je n'y suis pas favorable pour les députés", reconnaît d'emblée Gérard Larcher qui évoque une mesure "dans l'air du temps". Et "je militerai pour une proportionnelle qui soit la plus mesurée possible, pour ne pas nous conduire au spectacle auquel nous avons assisté en Allemagne", explique-t-il. "J’ai une tentation plutôt vers 10%", indique ainsi l'élu.

Limitation des mandats : "Le seul baromètre, c’est le suffrage universel"

La limitation dans le temps à trois mandats consécutifs pour les maires, les présidents d’intercommunalité, de département et de région est également l’un des principaux axes de cette révision constitutionnelle que veut faire passer le président de la République, mais aussi une ligne rouge pour la droite républicaine. "Le seul baromètre pour un démocrate, c’est le suffrage universel, le choix des citoyens. Nous allons ouvrir ce débat", oppose ainsi Gérard Larcher, pas franchement emballé par cette possibilité. "Le non-cumul dans le temps pour les parlementaires n’existe qu’au Portugal et au Mexique. Pour le Portugal, c’est un héritage de Salazar", tacle encore celui qui a été réélu pour la... sixième fois sénateur dans les Yvelines en 2017.

Représentation des territoires : "C’est un principe, un pilier"

Autre point de rupture : la réduction d’un tiers du nombre de parlementaires, envisagée par Emmanuel Macron et dénoncée par la droite comme un risque pour la représentativité des Français dans les institutions. "Il faut que le nombre soit ajusté à la représentation territoriale […]. Vous ne pouvez pas parler du territoire s’il n’a pas de représentant", explique le président du Sénat. "Imaginez qu’un département pauvre en démographie n’ait pas un sénateur ou un député au minimum pour le représenter et porter la voix du territoire. Comment la démographie fonctionne-t-elle ?", interroge encore le sénateur. "Ça n’est même pas une ligne rouge, c’est un principe, un pilier de bon sens pour éviter d’avoir une France qui se sente abandonnée, oubliée, fracturée".

La menace d'un référendum : "Il faut d’abord un vote majoritaire dans chacune des chambres"

Pour passer outre l’opposition des députés et sénateurs  de droite - les trois-cinquièmes des voix du Parlement étant nécessaires pour reformer les institutions -, Emmanuel Macron a évoqué la possibilité d’un référendum, par le biais de l’article 11 de la Constitution. "L’article 11 est pour les lois ordinaires, éventuellement les lois organiques, mais pas la révision constitutionnelle", assure Gérard Larcher. Dans la hiérarchie des normes législatives, la loi organique, qui précise le fonctionnement des pouvoirs publics, se situe sous la Constitution, qui définit et fixe les orientations des institutions. "Le référendum fait partie des procédures parlementaires, mais la révision de la Constitution relève […] de l’article 89. Il faut d’abord un vote majoritaire dans chacune des chambres et puis, ensuite, le président peut soit réunir le Congrès, soit faire appel au peuple français. C’est sa liberté", explique-t-il. Dans tous les cas, Emmanuel Macron devra donc se soumettre, selon lui, à un vote des élus de l'Assemblée nationale et du Sénat.