L'Assemblée a rejeté vendredi soir l'interdiction de toute activité de conseil pour les parlementaires lors des débats sur le projet de loi organique pour la confiance. Cette disposition était défendue notamment par les socialistes et dépeinte comme un recul sur une promesse du candidat Macron.
Pour que les députés ne soient pas "au service de quelques uns". Après notamment le cas de François Fillon, qui avait créé une société de conseil une dizaine de jours avant le début de son mandat de député en 2012, Emmanuel Macron a voulu interdire aux parlementaires "d'exercer des activités de conseil" pour qu'ils ne soient pas "au service de quelques-uns".
Un lobbyisme déjà prohibé en commission. Pour tenir compte des censures par le Conseil constitutionnel des interdictions générales, les textes prévoient que les parlementaires ne pourront pas acquérir une société de conseil, ni commencer une fonction de conseil en cours de mandat. Mais ils pourront poursuivre une telle activité si elle a débuté plus d'un an avant leur entrée en fonction.
Le Sénat avait déjà ajouté l'obligation pour les candidats à l'Élysée d'une déclaration d'intérêts et d'activités. Et en commission, les députés avaient prohibé pour les parlementaires la fonction de lobbyiste pour le compte de certaines sociétés.
Interdire complètement cette activité pour éviter les "dérives graves". La socialiste Delphine Batho, soutenue par le président de son groupe Nouvelle Gauche Olivier Faure ou Olivier Dussopt, a notamment plaidé ardemment a minima l'interdiction absolue de l'activité de conseil. L'ex-ministre de l'Écologie a notamment souligné que c'était "un engagement présidentiel, justifié parce qu'un certain nombre de dérives graves continuent".
Elle a alerté sur "l'influence de grandes multinationales sur la vie publique", prévenant que "Monsanto, Bayer ou autre pourraient continuer à rémunérer des parlementaires pour une activité de conseil". Et Olivier Faure a lancé au président de l'Assemblée, François de Rugy (ex-écologiste devenu REM), qu'il avait lui-même défendu une telle mesure "longtemps avant de (se) renier".
Un risque d'inconstitutionnalité. La ministre de Justice et ex-membre du Conseil constitutionnel, Nicole Belloubet, a plaidé que "l'idée du gouvernement était bien de restreindre considérablement l'exercice de fonctions de conseil, sans aller toutefois jusqu'à l'interdiction générale et absolue parce que nous considérons qu'elle serait censurée par le Conseil constitutionnel".
Mettre fin aux conflits d'intérêt sans se priver des "talents du privé". Alice Thourot (REM) a expliqué que "notre objectif est de mettre fin aux conflits d'intérêts, pas de tout interdire ni d'interdire toute activité professionnelle, parce que nous considérons que nous ne devons pas nous priver de talents du privé, mais d'interdire les activités de conseil d'opportunité qui aurait commencé plus d'un an avant".
Une "faute morale" pour Corbière. Refuser d'interdire le conseil est "une faute morale", a lancé à la majorité Alexis Corbière (LFI), disant aussi ne pas comprendre le "silence" de la ministre et de la rapporteure. Les Insoumis ont échoué auparavant à faire voter l'arrêt de toute activité professionnelle pour les parlementaires. Le député REM Jean Terlier a fait allusion à "une coupure de presse" sur la création d'une activité de conseil par un député LFI, dans une allusion à un article de Marianne sur Alexis Corbière, déclenchant des protestations des Insoumis, notamment de Jean-Luc Mélenchon.