"Je vous dois des excuses". François Fillon a harangué ses partisans, réunis dimanche au Trocadéro, à Paris, les appelant à ne "jamais baisser les bras", et a invité "ses amis politiques" qui le poussent vers la sortie à faire leur propre "examen de conscience", sans réaffirmer toutefois qu'il irait jusqu'au bout de sa candidature. Pour David Revault d'Allonnes, notre éditorialiste, cette opération ressemblait un peu "à une opération kamikaze".
Profil bas sur la justice. Le lieu n’avait pas été choisi par hasard. Le Trocadéro, là où Nicolas Sarkozy avait tenté une ultime démonstration de forces pendant sa campagne présidentielle de 2012. Mais pour François Fillon, ce n’était pas un baroud d’honneur. A ses yeux, c’était une véritable bataille. Il y croit vraiment. Avec cet appel à la rue, au peuple de droite, il espérait vraiment créer un rapport de forces suffisant pour rester le candidat de son camp.
Quelque 200.000 personnes étaient là, selon le camp Fillon. En réalité, beaucoup moins, quelques dizaines de milliers. Mais cette dernière contre-offensive ressemble surtout à une opération kamikaze. Le candidat Fillon risque non seulement de disparaître, mais aussi d’emmener tout son camp avec lui.
Pourtant, il a mis de l'eau dans son vin, le candidat. Il a ainsi pris bien garde à ne pas attaquer les juges. Beaucoup de personnalités avaient critiqué un meeting organisé contre les institutions, contre les magistrats. Donc il a fait profil bas sur ce point. Mais pour le reste, le ton est toujours aussi dur.
"Fillon, c’est le forcené enfermé dans son cockpit". Fillon tape dur sur ses propres amis politiques, qui sont en passe de le lâcher. Il continue à hurler à l'assassinat politique. Mais ça ressemble de plus en plus à un suicide. Une opération kamikaze. Il fait de plus penser à ces forcenés armés et retranchés chez eux. Il ne manque plus que l’assaut du RAID ou du GIGN pour l’en déloger. Le problème, c'est qu'il s'est enfermé avec ses otages : les électeurs de droite. La solution ? Celle de l'issue de secours. A six semaines du premier tour, "le problème, c’est que Fillon, c’est le forcené enfermé dans son cockpit. Ce qu’il faut faire maintenant, c’est un travail psychologique", analyse un responsable des Républicain.
Depuis la semaine dernière, les personnalités quittent le navire. Après des semaines de scandale, ils se sont résolus à débrancher leur candidat. Ils le lâchent. D'ailleurs, ça n'a pas échappé au candidat : "ils pensent que je suis seul", a lancé Fillon en visant ses amis des Républicains.
Il restera à la barre, même s’il doit entraîner l’équipage par le fond. C’est cruel, la politique… Il y a un peu plus d’un mois, le candidat Fillon moquait le radeau de la méduse de la primaire PS. Aujourd’hui, ce sont ses remplaçants éventuels qui sont prêts à s'entredévorer sur le Titanic de la droite. Le capitaine Fillon a prévenu : il restera à la barre, même s’il doit entraîner l’équipage et les passagers par le fond.
Tout peut se jouer en quelques heures. C'est vrai que le temps presse. Alors les ténors de la droite ont lancé l'opération pour débrancher Fillon. Mais personne ne veut porter le premier coup, de peur de passer pour le traître, mais aussi de voir filer au FN une partie des électeurs de droite , ceux qui n’avaient pas voté Juppé et que Fillon a radicalisé ces derniers jours. La suite, c'est la réunion du comité politique lundi. Est-ce que les dirigeants des Républicains mettront un point final à cette longue et douloureuse agonie politique et installeront Alain JUppé à la place de Fillon ? C'est un peu leur dernière chance de sauver cette élection, qui était imperdable il y a deux mois mais qui semble aujourd'hui de plus en plus ingagnable.